1.7 - Poèmes dédiés au 26 mars

XI - Bibliothèque - Alger 26 mars 1962 - Ouvrages de références - Récits - Poésie 

3 - "Memento" d' Edmond ROSA - Nice - Mars 1970

Ô mon frère, mon parent, mon ami
Et toi aussi mon inconnu,
Ô vous rencontrés au hasard de la rue
Voici mon cœur, voici ce qu’il dit :

Il y a huit années…, C’était à peine hier,
Sur l’autre rive de la Méditerranée
Dans les plaines, dans les montagnes,
Dans les villes, dans les campagnes,
Dans les fermes, les bureaux, les ateliers,
Dans les rues comme sur les sentiers,
Partout tombaient impavides et fiers
Les fils d’une terre passionnée.
Et cependant, trahie, blessée, sanglante
L’Algérie toujours debout, était toujours vivante.
Il fallait donc à tout prix l’achever
Et c’est le 26 mars que ce crime fut fait.

En ce terrible jour, ô mon bel Alger bleu,
Toi si doux, si tendre, sous ton soleil doré,
Tu vas offrir ton cœur palpitant et joyeux
A ceux de Bab-el-Oued que l’on tient assiégés.
Foule immense d’hommes, de femmes et d’enfants,
Peuple de la ville enthousiaste et frémissant,
Portant allègrement nos trois couleurs partout,
Au corsage, à la main, et même autour du cou.
C’est ça à la fois, c’est ça l’amour,
Ce flot qui coule et va vers le faubourg.
Mais soudain les mitrailleuses crachent la mort,
Leur crépitement sinistre sentant jusqu’au port.
Puis, un instant, sur la ville tombe le silence.
Le feu marque un temps d’arrêt,
Et chacun dans son innocence
Se prend à espérer.
Mais hélas, il reprend, s’étend et se prolonge.
Minutes atroces ! Amer, douloureux songe !
On s’acharne sur nos amis sans défense
On les massacres, on les piétine,
Jusque dans les immeubles on assassine.
Et pour ce crime-là, mon Dieu, quelle diligence !
En voici quatre-vingt-cinq a jamais couchés,
Pâles, sanglants, meurtris, déjà glacés
Sur cette terre si chaude, sur cette terre française.
Et tous ces autres qui chantaient la Marseillaise,
Gémissent maintenant sur l’asphalte éclaté.   
Et le ciel par-dessus, comme aux beaux jours d’été.
Ô spectacle horrible, ô vision inhumaine,
Et tourne l’hélicoptère et hurle la sirène.

Nice - Mars 1970 - Edmond ROSA

Offert par Madame Richaud Anne-Marie
Fille du Docteur Edmond Rosa

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