8.1 - Les hélicoptères bombardent les hauts d’Alger : Plateau Sauliere – l’Agha – la rue Michelet – la Robertsau …

VI - Les témoignages - Grande Poste : les bombes lacrymogènes

1 - Monsieur Marc Boronad – (Un crime sans assassin – Francine Dessaigne – page 98)
     
... lancée par des hélicoptères une sorte de poudre

2 - Madame Boronad- mère (Un crime sans assassins – page 99)
     
... l'hélicoptère a lancé des objets en forme de cigares

3 - Madame Espi - (Un crime sans assassins – page 100)
    
... un hélicopère nous a suivi nous bombardant de grenades lacrymogènes

4 - Le Docteur Charles Portier - (Un crime sans assassins page 101)
    
... des grenades suffocantes nous ont fait quitter les lieux

5 - Monsieur Jean Bogliolo - (Un crime sans assassin - page 103)
    
... lorsqu’apparut à basse distance un hélicoptère de gendarmerie

6 - Monsieur ORSETTI Gabriel :
    
... ils lancent des grenades

7 -  Monsieur SUDRY Roger - 22 ans fils de Jean
    
... les yeux brûlés par une bombe lacrymogène de combat

 

1 - Monsieur Marc Boronad – (Un crime sans assassin – Francine Dessaigne – page 98)

Un peu plus bas dans la rue Michelet se trouvait la famille Boronad accompagnée de Madame Massonnat et de sa fille.
Nous aurons souvent à revenir sur la mort du docteur Massonnat qui suscita une très grande émotion dans la ville et dans les milieux médicaux.(Francine Dessaigne)

« C’est le colonel Vaudrey et Jacques Achard, si j’ai bonne mémoire, qui avaient invité la population à se masser sans armes et drapeaux tricolores en tête au plateau des Glières, pour se diriger ensuite vers les portes closes de Bâb-el-Oued. Nous marchions en groupe. Mon père, ma mère, ma sœur, une grande amie, Madame Massonnat et sa fille, Catherine âgée de 16 ans. Les jeunes autour de nous, agitaient les drapeaux et criaient : « Algérie française ! ». C’est alors que nous avons reçu, lancée par des hélicoptères, une sorte de poudre qui rappelait les gaz lacrymogènes et qui tout de suite nous a fait pleurer et tousser. Un mouchoir sur le visage, nous avons continué à marcher. Nous nous trouvions bien avant la hauteur du tunnel des Facultés lorsque nous est parvenu le bruit des rafales d’armes automatiques. Mon père s’est exclamé : «Ils tirent à blanc, il faut continuer ! ». J’ai répliqué « Le 24 janvier, ils n’ont pas tiré à blanc. Je me méfie ! » C’est alors que le téléphone arabe s’est tout de suite mis à fonctionner : « La troupe a tiré sur la foule désarmée. C’est un carnage. Des centaines de morts. Il faut se replier ».

C’est ainsi que pour nous, la manifestation a tourné court. Nous avons décidé de rentrer. Arrivés dans notre appartement, nous nous sommes précipités sur le transistor. En dehors des émissions pirates, nous n’écoutions qu’Europe 1. La radio d’État ne donnait que des informations tronquées. Quant à Radio Luxembourg, je ne supportais pas un journaliste, sûrement d’origine arabe, du nom de Jean-Pierre Farkas qui avait à l’époque un long temps de parole et ne manquait jamais de décocher ses flèches progressistes sur les pieds-noirs ni de cracher son venin sur l’OAS.

Nous avons su tout de suite qu’il y avait de nombreux morts et de nombreux blessés du côté de la Grande Poste. Le téléphone a sonné. C’est moi qui ai pris le récepteur. J’ai reconnu la voix de notre voisine de palier et sa voix était haletante. Notre voisine, elle était la nurse principale de la clinique Solal située avenue Claude Debussy.

– Marc, tu m’entends ? Le docteur Massonnat, c’est bien un de vos amis ? On vient de le ramener. Il vient de mourir, maintenant… Marque tu m’entends. Le docteur Massonnat! Il est mort…

Je me suis retourné. Christiane Massonnat était derrière moi et sa fille, et toutes les deux m’ont lancé un regard interrogateur.

J’ai envie de passer sur les détails morbides. L’aveu. Une femme et sa fille en pleurs, terrassées par la douleur. Je me souviens vaguement être sorti sur le balcon, avoir arraché le drapeau français.

Visite à la morgue ensuite. Par terre, les cadavres allongés les uns contre les autres. Les familles en pleurs qui venaient reconnaître l’un des leurs. C’est difficile de se rappeler les cris, les larmes, cette odeur qui flottait et soulevait le cœur. Je ne peux pas dire, même après tant et tant d’années, que je garde un souvenir flou de cette journée. Oh non ! C’est seulement une journée qui est inscrite dans ma mémoire comme un cauchemar que je répugne à évoquer ».

Le groupe de Marc Boronad se trouvait bien avant le tunnel des Facultés lorsqu’il reçut une sorte de poudre lâchée des hélicoptères …..

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En bleu le flux des manifestants et en rouge le groupe bombardé, quartier de l’Agha.

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