2.2 - Textes internationaux sur les disparitions forçées

VII - Après le 19 mars le mensonge d'Evian - Les disparus civils : Textes - Enquêtes - Témoignages - Pétition internationale

2 - ONU CONVENTION sur les DISPARITIONS FORCEES

Le Monde 7 FEV 2007

Parce que la France s'est fortement mobilisée, au côté de l'Argentine, pour que la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, adoptée par l'Assemblée générale de l'ONU le 20 décembre 2006, voie le jour, c'est à Paris que s'ouvre, mardi 6 février, la cérémonie d'ouverture de signatures du texte.

La Convention :

- définit le crime de disparition forcée ;

- fait reconnaître de nouveaux droits, en particulier le droit des victimes à connaître la vérité sur les circonstances des disparitions forcées, ainsi que leur droit à la protection et à la réparation ;

- oblige les Etats à prendre des mesures préventives en renforçant les garanties autour de la détention ;

- stipule que les adoptions issues de disparitions forcées peuvent être annulées. Elle met en place un mécanisme de suivi doté de pouvoirs d'enquête ;

- crée un organe de suivi général : le Comité des disparitions forcées. Composé de 10 membres, pour une durée de 4 ans, il remplira, outre les fonctions classiques d'un organe de traité (examen des rapports des Etats), une fonction préventive en lançant des appels et en effectuant des visites sur place.

Il s'agit du premier traité à interdire, en toutes circonstances, la pratique des disparitions forcées, c'est-à-dire l'enlèvement de personnes et leur détention dans des lieux secrets - souvent accompagnée de tortures - et cela quels que soient les auteurs de ces forfaits, qu'ils soient les agents d'un Etat (police, armée) ou tout groupe non étatique, telles milices ou guérillas.

Les premiers efforts diplomatiques français en la matière remontent à la fin des années 1970, en réaction aux disparitions forcées perpétrées sous la dictature militaire en Argentine. Une vingtaine de pays, représentés par leur ambassadeur ou leur ministre des affaires étrangères, devaient signer, mardi à Paris, ce texte qui, pour entrer en vigueur, doit être ratifié par vingt Etats.

La cérémonie doit se dérouler au Quai d'Orsay en présence notamment de la sénatrice Cristina Kirchner, épouse et représentante du président argentin, du Haut Commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme, Louise Arbour, du président du Comité international de la Croix-Rouge, Jakob Kellenberger, et de la représentante des "Mères de la place de Mai" en Argentine, Marta Vasquez Ocampo.

Pour les militants des droits de l'homme, cette convention marque un tournant. Elle qualifie de crime contre l'humanité "la pratique généralisée ou systématique de la disparition forcée". Elle instaure un régime important de prévention et de protection, reconnaissant notamment aux proches des victimes de disparitions forcées et à leurs défenseurs un droit à l'information, à la vérité, et à des réparations. Ces éléments reprennent certaines dispositions figurant dans les statuts de la Cour pénale internationale (CPI) siégeant à La Haye.

La nouvelle convention contraint les Etats parties à prendre les mesures nécessaires pour faire traduire en justice un responsable présumé de disparition forcée s'il se trouve sur leur territoire, ou bien de l'extrader, ou de le remettre à une juridiction internationale.

Le texte qualifie par ailleurs la disparition forcée de crime continu, c'est-à-dire que la prescription ne commence à courir qu'à partir du moment où le crime a été élucidé. Ce qui peut permettre aux familles de victimes de bénéficier de longs délais pour se porter devant la justice.

Enfin, la convention, fait observer Antoine Bernard, directeur de la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH), "consacre la responsabilité du supérieur hiérarchique", autrement dit, elle empêche que le donneur d'ordre soit soustrait à la justice sous prétexte que ce n'est pas lui qui a commis directement le crime.

La convention prévoit, en outre, la création, pour une période de quatre ans, d'un Comité des disparitions forcées, composé de dix experts indépendants. Celui-ci pourrait, en cas de violations massives et systématiques, porter une situation à l'attention du secrétaire général des Nations unies, lancer des appels urgents, ou effectuer des visites sur place.

La nouvelle convention, dont les militants des droits de l'homme espèrent qu'elle entrera rapidement en vigueur, a été négociée dans un contexte chargé, marqué par le scandale, apparu fin 2005, des "prisons secrètes" de la CIA dans le cadre de la lutte antiterroriste.

Loin de s'être raréfié depuis l'époque des dictatures militaires en Amérique latine, le crime de la disparition forcée "connaît un tragique regain d'actualité", souligne la FIDH. Les régions et pays comptant actuellement le plus de disparitions forcées au regard de la population locale sont le Népal, la Tchétchénie et la Colombie.

Natalie Nougayrède

Envoi de Gilles BONNIER -  Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.
mardi 6 février 2007 17:57

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