5.24 - MASSONAT Jean - 38 ans

VI - Les témoignages - Grande Poste Les familles, les amis, les journaux

MASSONNAT Jean 38 ans

1 - Témoignage de madame Boronad, Mère, une amie de la famille Massonat
2 - Témoignage du Docteur Roger Debaille

3 - Témoignage de Georges Massonnat, frère aîné de Jean Massonnat
4 - Les documents "Secret - Urgent" "Secret - Confidentiel"

Docteur en médecine. Médecin des Hôpitaux.
Chef de service au Centre hospitalier et universitaire d’Alger.
Médecin capitaine de réserve. Croix de guerre 39-45
Tué dans l’exercice de ses fonctions – victime du devoir professionnel

 

1 - Témoignage de madame Boronad, Mère, une amie de la famille Massonat

Recueilli par Francine Dessaigne (Un crime sans assassin)

Le 26 mars 1962, en début d’après-midi, notre ami le docteur Massonat a déposé sa femme et sa fille devant chez nous. Nous devions nous rendre ensemble à la manifestation. Lui, le médecin, ne pouvait nous accompagner : il devait rendre visite à un enfant malade. Tout de suite Madame Massonat nous a dit que son mari était très contrarié parce qu’elle-même et sa fille participaient à cette manifestation. Il était pessimiste. Il craignait que l’armée tire sur les manifestants

Mon mari, mes enfants, Madame Massonat, sa fille et moi-même avons pris la direction de la Grande Poste. Nous étions encore rue Michelet quand nous avons entendu la fusillade qui se déclenchait. Presqu’aussitôt ensuite, (nous nous trouvions face à la Banque Populaire) un hélicoptère a lancé des sortes de grenades lacrymogènes, des objets en forme de cigare qui tombaient sur le sol ; ils tournoyaient sue eux-mêmes bruyamment et dégageaient un gaz lacrymogène étouffant. Impossible d’aller plus loin. Nous nous sommes réfugiés dans un immeuble, la respiration coupée, puis nous sommes tous retournés chez nous. Notre voisine, infirmière et nurse principale de la clinique Claude Debussy, nous a téléphoné pour nous demander si le prénom de notre ami était bien Jean. Elle nous a alors appris que le docteur Massonat, grièvement blessé au cours de la fusillade, venait de succomber.

Quelques mois plus tard, en l’église de la Madeleine, était célébrée une messe à la mémoire du docteur Massonat. Assistait à cette messe un monsieur dont je n’ai jamais su le nom (employé des chemins de fer), qui s’est adressé à moi et m’a fait part de son témoignage.
Voici : le médecin se trouvait près de l’horloge de la Grand Poste et il lui fallait franchir le barrage car son jeune malade attendait. Le médecin s’est expliqué, a insisté, mais l’officier est resté intraitable. Le docteur Massonnat a alors fait remarquer : « Si vous aviez un enfant malade, ne souhaiteriez-vous pas qu’un médecin vienne le voir ? «  Alors l’officier a fléchi et a accordé le passage. C’est à ce moment précis que la fusillade a commencé. Le docteur Massonnat s’est abrité contre un mur. À quelques mètres de lui, un garçon est tombé, fauché par les balles. Il s’est élancé à son secours et l’homme dont je tiens le témoignage a essayé de le retenir. En Vain ! Le docteur Massonnat s’est agenouillé près du blessé et a sorti un garrot de sa poche. Deux des soldats arabes se sont approchés, l’un d’eux portait une mitraillette. Le docteur Massonnat l’a regardé et l’homme armé a semble-t-il hésité un instant. Alors l’autre soldat a crié : « Tire ! Tire ! » Et le coup est parti.


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