2.18 - L'histoire de l'Enseigne de vaisseau de 1ère classe de réserve Philippe GAUTIER 1958 -1962

IV - Date emblématique d'un massacre collectif  - Lundi 26 mars 1962 à Alger

3 - LES COMMANDOS TRÉPEL ET JAUBERT CROISENT DANS LA MER D’ALFA - Un reportage de Jean Taousson

 Un reportage de Jean Taousson – L’ÉCHO d’ALGER -  JUILLET 1959

 Aflou rôtissait sous le soleil de juillet. La chaleur torride qui dégringolait du ciel aurait pu justifier un mirage. Pourtant je n’avais pas la berlue : c’était bien un fusilier marin qui montait la garde devant un groupe de tentes kaki, disséminées dans un bosquet.

A des kilomètres du littoral oranais, au pied d’une montagne qu’ils escaladent comme les plus chevronnés des tirailleurs de compagnies muletières, les commandos de marine veillent au grain. Depuis le 10 juin, ils sont à la disposition du général HUBERT dans la zone opérationnelle de l’Atlas saharien.

LES MARINS ET LA RÉBELLION D’ALGÉRIE

Des marins en montagne, pourquoi pas après tout. A ceux qui verraient là une mauvaise utilisation des compétences, il suffira de rappeler que la guerre d’Algérie n’a rien de conventionnel.

Les commandos de marine constituent assurément une arme d’élite qu’on ne pouvait laisser rouiller dans les camps d‘entrainement du littoral sous simple prétexte qu’ils n’ont pas leur utilisation originelle.

Formés en Angleterre pendant la second guerre mondiale, les « marines » français au béret vert, héritiers des fusiliers marins de Fouchéou et Dixmude furent employés dans des missions de débarquement en Indochine, à Suez et plus avant dans l’histoire, à des coups de main audacieux sur les côtes de Corse, d’Italie et de Provence. Adaptés aux exigences du moment, ils forment aujourd’hui un redoutable outil de chasse : dans la Z.O.A.S., véritable zone expérimentale de la guerre révolutionnaire, le groupement de commandos marine est l’autre poing d’acier du général HUBERT.

Le groupement basé à Aflou est composé du commando « Trépel », dirigé par le lieutenant de vaisseau Éliés et du commando « Jaubert » à la tête duquel le lieutenant de vaisseau Scheidauer a succédé au capitaine de corvette Costagliola.

Le capitaine de corvette Costagliola est Oranais. C’est lui qui commande le groupement.
Un autre commando le « Montfort » est resté à Nemours. Le commando « Penfetenyo », enfin qui surveillait à Aïn Sefra les franchissements de la frontière regagne la métropole pour y prendre quelque repos.

Ces quatre unités sont à 85 hommes – quartier-maitres et marins – commandés par quatre officiers  et neuf officiers mariniers.

Comme à la Légion, les commandos de marine sont tous engagés volontaires. Le centre Siroco est chargé de leur entraînement. Il n’est pas nécessaire de rappeler les méthodes du centre pour affirmer que ces hommes sont physiquement et moralement sélectionnés, aptes à toutes les missions dangereuses, à tous les coups durs.

Leur formation même, frappée de l’étiquette « commando » fait d’eux des guérilleros supérieurs, à qui les plus anciens fellagha, façonnés dans les camps d’entraînement communistes pourraient difficilement en remontrer.

ILS ONT COMPLEXÉS LES FELLAGHA

Pleinement utilisés en commandos de chasse depuis la mise en place du plan CHALLE, ils ont, par leurs opérations multiples « complexés » les rebelles de leur région. Travaillant de nuit, toujours en mouvement, les commandos de marine ont en quelques semaines créé de véritables zones d’insécurité pour l’adversaire. Aussi paradoxal que cela paraisse, « Trépel » et « Jaubert » ont rarement accroché. Leur dernier engagement qui coûta 22 morts aux fellagha remonte au début du mois de juillet 1959.

Connaissant la valeur combattante de ces hommes qui s’illustrèrent sur les côtes du Tonkin et à  Port- Fouad  les fellagha ne se risquent guère dans leur secteur.
Au mois de mai, un commando rebelle composé de durs qui préparaient le passage d’une katiba à la frontière marocaine, reflua en vitesse au premier contact avec les « Marines ». Jamais encore cette « formation d’élite fellagha » n’avait été accrochée si durement.

Dans la plaine d’Aflou, je n’ai pu m’empêcher de marquer un certain étonnement à la vue de marins investissant des rhaïmas (1) de nomades ou contrôlant des caravanes de chameaux. Eux, paraissaient pourtant très à l’aise : la Méditerranée ou la plaine d’alfa, disaient-ils …

Que ce soit en opérations ou au cantonnement, 4 hommes et officier n’ont pas oublié qu’ils étaient marins. Ils ont conservé leurs traditions et la nouvelle tâche qui leur a été confiée, n’a pas altéré l’esprit naval qui les anima.
"Après tout notre vocation est aux voyages, déclarait un jeune officier. Jamais les bateaux ne nous auraient conduits au djebel. Eh bien c’est pour nous une belle occasion de voir du pays."

1. Tentes faites de couvertures que les femmes tressaient avec la laine des moutons

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