7.7 - OAS. Témoignages

 

1 - Témoignage d'André DECHAVANNE : "Au sujet de mon appartenance à l’OAS je vais vous en donner l’origine. - Mallorca 23 août 2008

N’ayant pas été appelé dans les unités territoriales (ex aviateur) j’y suis entré volontairement et j’ai eu une section pendant plus d’une année. J’habitais alors tout en haut de la rue Duc des Cars, en bordure du Télemly, un an ou deux après, ma mémoire est infidèle, j’ai été démobilisé (limite d’âge).

A la naissance de l’OAS, j’ai appris par un camarade, que mon ancien capitaine en faisait partie. Je suis allée le voir et il m’a confié un secteur qui partait du Télemly jusqu’au tunnel des facultés (non compris), rue Duc des Cars, rue Valentin, rue Abbé de l’Epée. Mon premier rôle fut d’entrer en contact avec mes anciens territoriaux et d’étendre, si bien que j’avais une centaine d’hommes sous mon commandement, avec mission essentielle, ramassage de fonds.

Nous avons organisé la cache du bazooka et la fuite du légionnaire qui avait détruit un engin blindé à l’entrée du tunnel, ceci en liaison avec René Torres qui commandait le secteur voisin. Nous ne faisions pas partie des Deltas. C’est lui qui avait entreposé l’un des arsenaux de l’OAS dans les locaux de son territoire près des bureaux de l’EGA, qui m’avait donné cette grenade quadrillée, très meurtrière. Ce jour-là, « mon patron » m’avait chargé, personnellement d’aller porter un pli à l’un des supérieurs « Nini » et le hasard a voulu que ce fut un ancien voisin. Il m’a amené à un supérieur qui m’a demandé de surveiller la section de la Grande Poste et donné le nom d’une dame qui habitait dans l’immeuble qui se trouvait où a eu lieu l’horrible meurtre. Pour sa sécurité je lui ai demandé la clef de la terrasse d’où je devais me renseigner sur ce qui allait suivre. La buanderie était une cache et je n’en sortais que rapidement jusqu’à ce que j’entende la fusillade.

Mon cabinet d’assurances, situé alors au rez-de-chaussée du grand immeuble « Le Lafayette » était la boîte aux lettres (l’une d’elles). Elle avait été choisie à cause de sa fréquentation permanente de mes clients. J’étais en liaison avec Mademoiselle Antoine, l’ophtalmologue connue qui avait installé un bloc opératoire pour soigner des blessures peu importantes. De mon côté, elle a soigné un légionnaire déserteur, victime d’un accident d’automobile que j’assurais et qui était conduit par mon assuré et ami d’enfance Etienne Mattei. Il s’agissait d’une fracture de la tête radiale.J’ignorais qu’il avait été demandé aux manifestants de ne pas porter d’arme ! Comment le faire ? Comment le vérifier ? Tout était « secret », mais ces secrets étaient souvent mal gardés et l’improvisation remplaçait la coordination. Personnellement, je savais ce que je ne devais pas savoir, par sécurité. Je connaissais les noms et les fonctions des camarades qui se trouvaient hors de mon secteur et moi qui vivais et travaillais dans le centre de la ville, je savais qui était le « patron » de l’OAS à Bab el Oued ! Des garçons faisaient partie parfois de deux organisations différentes, souvent lassés de l’immobilisme d’un secteur. Il y avait beaucoup à faire et à mieux organiser.Cette organisation avait pourtant vu le jour dans le sein de l’UFN (R ou A) ? de Martel ou celle d’Ortiz (déjà deux différentes et concurrentes !). J’avais été là aussi sa boîte aux lettres pour la même raison. Tout mon personnel était favorable à l’OAS. Je conçois qu’il était très difficile de faire autrement car chacun avait sa tache professionnelle à accomplir. Mon supérieur et mon adjoint ont été arrêtés et emprisonnés.

Je suis passé au travers des mailles après avoir quitté ma maison pour vivre sur mon voilier. J’ai sauvé celui d’un voisin de mouillage en le pilotant jusqu’à Ibiza, puis je suis parti à mon tour sur un bateau de 9 mètres que j’ai piloté jusqu’à Marseille et après deux jours de repos, jusqu’à Palma.En France, à Paris, à Nice, à Toulon, au Pradet, je ne me suis jamais senti chez moi et cela fait plus de trente ans que je suis à Mallorca où je me sens moins étranger qu’en France. Une partie des Français qui y vivent viennent d’Afrique du Nord. Le climat est aussi celui de notre Algérie et la végétation est la même et la mer, cette Méditerranée que j’adore se retrouve encore au nord.Moi qui crois en Dieu, je ne peux m’empêcher de haïr De Gaulle et ses complices. Quand je suis parti d’Alger et après un dernier regard sur la ville, j’ai déchiré et jeté ma carte d’électeur dans le port."

Mallorca, 23 août 2008.

André Dechavanne
Écrivain Poète
de la Société des Poètes français
Voir son témoignage en tant que manifestant du 26 mars ici

SECTEUR confié
En bleu la rue Michelet qui descend du Plateau Saulière, la rue Charles Péguy qui traverse le boulevard Laferrière, la rue d'Isly.
Au n° 10 la Grande Poste en bleu
Les Facultés, numéro 59, en grisé, bâtiments en noir
Le numéro 3 indique le Gouvernement Général
A l'Est le quartier de l'AGHA. 
En rouge, la rue Duc des Cars, où habitait André Dechavanne, qui se poursuit en montant par le boulevard du Télemly, puis rue Abbé de l’Épée,  rue Valentin qui mènent au Parc Saint Saens et au Quartier de la Robertsau. 
Plus au nord, El Biar

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