6.11 - Terrorisme - Témoignages
III - Histoire et récits - Mars 1962-C'était tout ce poids dans la tête...
10 - Un terrorisme d'Etat - Plainte auprès du Prefet de Police d'Alger
Union Interprofessionnelle et Intersyndicale de l’Energie des Transports
ALGER le 21 mars 1962
Monsieur le Prefet de police
Préfecture de Police d' ALGER
Monsieur le Préfet de police,
Le vendredi 16 mars 1962, les Sociétés de Distribution de pétrole et le Syndicat des détaillants de carburant se sont mis en grève pour protester contre l’enlèvement arbitraire sur son lieu de travail, de Monsieur PETITJEAN, ingénieur à la Société Nord africaine des Automobiles Berliet à ROUÏBA.
Le même jour, l’Union Interprofessionnelle et Intersyndicale de l’Energie et des Transports, dans une motion qui vous a été adressée, vous faisait part de son intention de se solidariser avec les grévistes, si aucune information valable ne lui était donné sur la détention de Monsieur PETITJEAN, avant le samedi 17 mars 1962 à 15 heures.
Le dimanche 18 mars 1962, alors que, pour permettre aux membres du Corps médical de remplir leur mission, nous avons accepté l’ouverture d’une station-service (station SCHELL, boulevard Gallieni à El Biar), de graves incidents, que nous relatons ci-après se sont produits.
Une file de voitures appartenant à des membres du Corps médical faisait la chaîne devant la station service dans l’attente d’être servies, « lorsqu’une jeep immatriculée 025036, portant la marque distinctive de la gendarmerie et occupée par un adjudant », remontant le boulevard Gallieni, s’est trouvée bloquée par la chaîne de voitures.
L’adjudant de gendarmerie a crû devoir insulter les passagers des véhicules, ce qui amena par réaction l’un des conducteurs à klaxonner « Algérie française ». L’adjudant de gendarmerie au paroxysme de la fureur, arma sa mitraillette et tira une rafale de six balles qui passaient au-dessus de la tête des personnes qui se trouvaient sur la piste de distribution. Le gendarme qui occupait la place arrière de la jeep, sortit son pistolet automatique et tira une balle par terre qui par ricochet passa entre les jambes des mêmes personnes.
De tels faits, encore plus inadmissibles à l’heure présente, nous amènent à confirmer la plainte que nous avions déposé le 21 février 1962 à 16 heures 40, auprès de Monsieur le Secrétaire général de la Préfecture de police, au sujet du mitraillage le 20 février 1962 à 20 heures 15, d’une voiture de service d’AIR ALGERIE, par les gendarmes mobiles.
De tels actes de violence dirigés contre des travailleurs dans l’exercice de leur profession, ne sauraient rester impunis, sans que les Pouvoirs publics n’en portent la lourde responsabilité.
C’est pourquoi nous vous redemandons que les deux enquêtes, la première étant restée sans réponse à ce jour, soient effectuées avec le maximum de diligence et que les sanctions méritées soient prises pour flétrir les actes qui risquent d’entraîner toutes sortes de réactions incontrôlables des paisibles travailleurs.
Dans l’attente d’une réponse qui, osons l’espérer, nous donnera satisfaction, veuillez croire, Monsieur le Préfet de police, à notre considération distinguée.
Le Comité Directeur
de l’Union Interprofessionnelle et Intersyndicale
de l’Energie et des Transports
Pour E.G.A
|
Pour S.N.C.F.A.
|
Signé : BLANCHET SAINSOT CIPRESSO |
Signé : FERNANDEZ BORJA HERMITTE |
Pour les Sociétés Pétrolières d’Exploitation
|
Pour les Sociétés Pétrolières deDistribution
|
Signé : BATARD GOURGOUILLON PRUD’HOMME |
Signé : D’APREVAL GERARD TUDURY |
Pour l’Aéronautique Civile
Signé : JANIN
JORDY