6.11 - Terrorisme - Témoignages

III - Histoire et récits - Mars 1962-C'était tout ce poids dans la tête...

3 - Témoignage d'Hervé CUESTA pour Pierrette DONATO - 2008 : "attentat au Casino de la Corniche - Saint Eugène  juin 1957"

recueilli par Hervé CUESTA : La Roquette sur Siagne 06550  pour le joindre Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

"Ma voisine Pierrette DONATO avait 19 ans ce jour-là, le 21 juin 1957. Elle a eu le foie transpercé, un rein en moins et surtout elle est devenue paraplégique. Depuis 3 ans son unique rein ne fonctionne plus. Elle est donc sous dialyse ...Comment peut-elle oublier les valeureux combattants de la libération algérienne" ?

Pierrette DONATO en 2008

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8.les victimes 21

 

Au Casino de la Corniche, situé sur un éperon rocheux de Saint-Eugène, dans la proche banlieue d'Alger, un gamin de dix-sept ans, plongeur dans l'établissement, posait un paquet sous l'estrade qu'occuperait quelques heures plus tard l'orchestre de l'enfant chéri de Bâb-el-Oued : Lucky Starway.

Le Casino de la Corniche était le nouvel objectif de Yacef Saadi. Là, pas d'enfants. Seulement des jeunes gens, beaucoup de militaires, d'inspecteurs de police, de joueurs. Et pas de musulmans. Ils étaient refoulés à l'entrée. C'est pourquoi Yacef avait eu besoin de la complicité d'un employé du Casino. Il ne l'obtint qu'en promettant au jeune homme de le faire évacuer au maquis avant l'explosion de la bombe.

 

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L'engin explosa 18 h 55, fauchant des dizaines de couples qui dansaient tendrement. L'estrade fut littéralement soulevée par l'explosion. Le piano réduit en miettes. Lucien Scror, dit Lucky Starway, était mort sur le coup, éventré. Sa chanteuse eut les pieds arrachés, le danseur Paul Pérez, les jambes sectionnées. Lorsque la fumée et la poussière des gravats furent retombées, plus de cent personnes gisaient dans les décombres, perdant leur sang. Le silence qui succéda à l'explosion fut bientôt déchiré par les hurlements des blessés. La bombe ayant explosé au ras du sol la plupart des victimes étaient atteintes aux membres inférieurs.

Huit morts. Quatre-vingt-un blessés dont dix furent amputés ! Les douze blocs opératoires de l'hôpital de Mustapha fonctionnèrent toute la nuit. Alger était à nouveau atteint de folie sanguinaire. Le cycle répression-attentat avait repris avec une intensité que jamais la capitale n'avait connue.

Et le mardi, aux obsèques des victimes, ce fut l'émeute. Comme à l'enterrement de Froger. Les ratonnades. Les magasins saccagés. Les C.R.S. qui tentent de contenir la foule en furie. Les grenades lacrymogènes... Le couvre-feu fut établi à 21 heures.

L'exaspération était à son comble. Chez les Européens, chez les musulmans, on veillait des corps. Le, fossé venait de s'élargir et de se creuser un peu plus. Ce n'était plus un fossé, mais un ravin ! Les débris laissés par l'émeute étaient tout juste balayés, la fumée des gaz lacrymogènes était à peine chassée par l'air printanier que Bigeard et ses hommes du 3ème R.P.C. revinrent dans le merdier.

 

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