4.1 - 8 Mai 1945 : Setif - Guelma - Kerrata - Les massacres dans le Constantinois...

III - Histoire et récits - De 1945 à 1962 les évènements

7 - De 1990 à nos jours : retour de mémoire et instrumentalisation de l'histoire par Guy Pervillé  2005

De 1990 à nos jours : retour de mémoire et instrumentalisation de l'histoire : extrait de sa Communication au Colloque Mémoire et Histoire 60 ans après le 8 mai 1945 - Berlin

L'évolution en cours semblait donc annoncer une convergence des travaux historiques favorable à un accord sur les grandes lignes du sujet entre les historiens des deux pays. Mais elle fut perturbée par un évènement imprévu, lié à la transformation soudaine de la vie politique algérienne par la libéralisation du régime politique algérien en 1989 et par la contestation croissante des islamistes.

C'est en 19990 que fut créée la Fondation du 8 mai 1945 par l'ancien ministre Bachir Boumaza, natif de Kerrata au nord de Sétif. Suivant l'un de ses premiers manifestes, celle-ci était " née dans un contexte politique dangereux. Celui de la révision insidieuse par certains nationaux, y compris dans les cercles du pouvoir, de l'histoire coloniale. Procédant par touches successives, certains hommes politiques ont, sous prétexte de dépasser une page noire de l'histoire coloniale, encouragé la normalisation des rapports entre l'ancienne puissance dominatrice et son ancienne colonie ".   C'est pourquoi la Fondation s'est donné pour objectifs de "réagir contre l'oubli et réanimer la mémoire, démontrer que les massacre de Sétif sont un crime contre l'humanité et non un crime de guerre comme disent les Français", pour "obtenir un dédommagement moral".

Ainsi l'histoire a été mobilisée au service de la mémoire et de la politique au lieu d'être reconnue comme un but propre.

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L'utilisation du 8 mai 1945 répondait évidemment à la volonté d'exploiter la contradiction entre la version officielle de cette fête nationale, consacrée à l'exaltation de la participation française à la victoire des Alliés sur l'Allemagne nazie, et la version non conformiste dénonçant une répression coloniale jugée digne des crimes nazis. Mais elle passait sous silence des faits gênants : l'opposition des nationalistes algériens radicaux à la mobilisation des algériens dans l'armée française en 1939-1940 et de 1942 à 1945, et les projets d'insurrection contre la France avec ou sans l'aide allemande conçus par plus d'un groupe de militants à l'intérieur du parti depuis les débuts de la Deuxième guerre mondiale (faits historiques révélés par les historiens algériens Harbi et Kaddache et confirmés par d'anciens militants dans la presse algérienne). On voit à travers cet exemple la différence considérable qui sépare l'histoire de la mémoire. Ajoutons que l'examen des travaux d'historiens algériens et français (même ceux dont l'anticolonialisme n'a jamais été mis en doute comme Annie Goldzeiguer et Charles-Robert Ageron) confirme que la répression du 8 mai 1945 en Algérie a bien été celle d'une tentative d'insurrection nationale insuffisamment préparée, et non pas un "crime contre l'humanité" ou un "génocide colonialiste" unilatéral.

Guy Pervillé

Historien

Spécialiste de l'histoire de l'Algérie française et de la guerre d'Algérie

Professeur à l'université de Toulouse II-Le Mirail

 

2.Jean BRUA1

Affiche offerte par Jean BRUA à l'attention de la manifestation contre le film de Rachid Bouchareb, sélectionné en compétition officielle pour le Festival de Cannes 2010

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