7.9 - Hôpital Civil de Mustapha - Plateau Saulière

VI - Les témoignages - Grande Poste les manifestants

2 - GILLE Christian - des enterrements à la chaîne 

ALGER en deuil 26 Mars 1962

"Je m'étais rendu à l'hôpital Mustapha d'Alger, le Lendemain du 26 mars, espérant pouvoir réconforter un ami qui venait de perdre son père. Sans difficulté particulière, je me suis retrouvé dans un grand hall ayant un accès direct avec une chaussée.

Sur le (ou les côtes) de ce bâtiment se trouvaient de nombreuses petites alcôves avec des plafonds voûtés en ogives et aménagées avec deux bancs. De façon symétrique, à l'intérieur de chacune d'elles, deux familles unies par leurs larmes se trouvaient séparées par deux cercueils accolés, déposés au centre sur des tréteaux.

On pouvait même voir dans quelques alcôves, des familles musulmanes et européennes atteintes par la mort  d'un proche, prier, pleurer, gémir et implorer le ciel côte à côte.

Des personnes totalement désespérées, circulaient dans le grand hall, en tout sens, criant, pleurant, appelant parfois à haute voix un être cher, en essayant de découvrir d'alcôve en alcôve leur proche disparu.

Par une porte, arrivaient à intervalles réguliers, d'un autre service de l'hôpital, un nouveau cercueil fermé, avec l'indication sommaire son nom.

Toutes les dix minutes environ, huit à dix personnes venaient prendre en charge un cercueil dans une alcôve, et s'arrêtaient un bref moment à hauteur d'une grande porte donnant sur la chaussée. Se détachant d'un groupe de religieux, un homme de  foi sortait d'un locales vitré et murmurait quelques mots, puis le cercueil quittait le bâtiment. Il était alors déposé dans la benne d'un camion militaire, où assis sur des banquettes, siégeaient environ dix soldats armés. Seuls quelques membres de la famille étaient admis sur une largeur de sièges d’un mini-car de CRS, puis motards en tête avec sirène, jeep avec radio, le camion-cercueil et deux véhicules de CRS s'éloignaient rapidement de l'hôpital vers un cimetière de l'agglomération.

Je réalisais venais d'assister à une véritable ignominie, avec la mise en œuvre par le pouvoir d' enterrements à la chaîne avec passages directs de la morgue vers un cimetière sans regroupement familial, où passage par les lieux de cultes des quartiers.

Je devais apprendre par la suite que des transports étaient intervenus de nuit pendant le couvre feu.

Christian Gille
Président du "Souvenir des Français Disparus en ALGÉRIE"
591, rue Dubois Raphaël - 83500 La Seyne sur Mer.

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