7.7 - Jonction Rue CHANZY - Rue d'ISLY

VI - Les témoignages - Grande Poste les manifestants

1 - Plan de l'intersection des Rues Chanzy et d'Isly

2 - AMIZET Yves- il me répond "je te jure je n’ai pas tiré" 

3 - FERRER CERDAN Jean-Pierre : des personnes au regard hagard, en larmes, erraient, perdues, déboussolées 

4 - SAUCOURT Robert : et puis les tirs reprennent, nous nous couchons à nouveau 

 

 

 

1 - Plan de l'intersection des Rues Chanzy et d'Isly



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VI - Les témoignages - Grande Poste les manifestants

2 - AMIZET Yves - il me répond "je te jure je n’ai pas tiré"

(Des témoignages d’Yves AMIZET ont été publiés dans le Livre Blanc, le « Livre interdit » dès sa parution en 1962)
Le 26 mars en début d’après-midi le Centre-Ville d’Alger est interdit à la circulation automobile par des blindés de CRS ou de gendarmes mobiles disposés en travers des voies d’accès. Par contre, chose étrange pour une manifestation urbaine interdite il n’y a pas de barrages pour les piétons.

Des dizaines de milliers de personnes convergent donc vers la Grande Poste, lieu de rassemblement du cortège qui doit emprunter ensuite la rue d’Isly, la rue Dumont d’Urville, la rue Bab Azoun puis la rue Bab el Oued.

Il y a principalement des hommes et des femmes de tout âge, de toute condition mais aussi quelques enfants. Plusieurs personnes portent des drapeaux tricolores à l’exception de toute pancarte ou banderole. En l’absence de tous slogans, cris ou chansons, la foule s’écoule lentement dans un silence absolument impressionnant qui accentue le caractère de gravité pacifique. Aucun manifestant, je dis bien aucun, ne porte une arme quelconque.

Personnellement je me situe vers le début du cortège, mais non à sa tête, cortège qui lorsque j’arrive à la Grande Poste est déjà engagé dans le rue d’Isly et arrive à la place Bugeaud. Juste avant l’embranchement de l’avenue Pasteur avec la rue d’Isly une section de militaires, européens pour la plupart en tenue de combat et fortement armés est disposée en travers de la route mais ce barrage est très lâche et laisse passer les manifestants très facilement, les soldats sont manifestement mal à l’aise et le dialogue s’engage avec les manifestants.

Le lieutenant commandant la section, très embarrassé aux questions concernant une éventuelle répression brutale, répond « nous avons des ordres » et fait replier ses hommes sur le trottoir pour laisser le libre passage sur la chaussée tout en indiquant « la relève arrive »… Ce mélange intime et jusque là neutre sinon pacifique est quelque peu irréaliste…. pour une opération de maintien de l’ordre en milieu urbain comme le fait que l’armement est un armement de combat : pas de matraques ni de grenades lacrymogènes mais des armes automatiques individuelles et collectives.

Pendant que j’avance lentement, une section de relève débouche effectivement de la rue Chanzy (venant sans doute du boulevard Bugeaud) et se mêle au cortège. Elle est composée de tirailleurs musulmans, manifestement tendus et nerveux dont on saura plus tard que la plupart d’entre eux découvraient la grande ville et à fortiori une manifestation urbaine. Je note sans savoir si ce détail a une signification, que leur casque lourd porte un petit rectangle vert. Quant à leur armement il est impressionnant : pistolets mitrailleurs, fusils, fusils mitrailleurs.

J’affirme sur l’honneur que, en tout cas, dans cette zone aucun coup de feu n’a été tiré, en provenance des manifestants, de la troupe, ou des terrasses d’immeubles, occupées d’ailleurs par les militaires. Je suis à l’angle de la rue Chanzy et de la rue d’Isly, sur le trottoir devant la vitrine de sous-vêtements Setamil, en compagnie d’un collègue du crédit agricole beaucoup plus âgé que moi, Pierre Yarendji.

Soudain pratiquement à mes côtés, sans aucune sommation et sans élément nouveau, un sergent musulman de grande taille lève son pistolet-mitrailleur Mat 49 vers le ciel et envoie une rafale. Il n’est pas tout à fait 15 heures.Aussitôt la fusillade éclate et les armes se mettent à cracher le feu de toute part. Instinctivement je tourne à droite dans la rue Chanzy mais les soldats placés dans la rue, à son intersection avec le boulevard Bugeaud, à une centaine de mètres à peine, ont ouvert le feu. Je me jette à plat ventre sur le trottoir, mon collègue Yarendji à demi couché sur moi et d’autres personnes ont fait de même.

Je vois à ma gauche dans le caniveau un homme essayant de s’abriter derrière une voiture en stationnement et les soldats rectifier leur tir pour essayer de l’atteindre. La fusillade est intense et tous azimuts. Certaines rafales sont tirées en l’air car nous recevons des éclats de ciment provenant des façades ou des balcons. On entend les rafales sourdes des mitrailleuses 12,7 des blindés des gendarmes mobiles qui, on le verra plus tard, ont balayé l’avenue Pasteur en enfilade et abattu de nombreuses personnes portant d’horribles blessures notamment dans le renfoncement du magasin Claverie (à côté de Setamil) où elles avaient cru trouver refuge.La fusillade continue avec la même intensité pendant 10 à15 minutes sans doute : difficile d’en apprécier la durée exacte !…. j’ai l’impression de chercher à m’incruster dans le trottoir.

J’aperçois à une cinquantaine de mètres à gauche dans la rue Chanzy devant le cinéma Midi-Minuit un lieutenant de type européen (on saura plus tard qu’il était Kabyle) son pistolet à la main, crier « halte au feu » ! À plusieurs reprises avant de reculer dans le hall du cinéma pour ne pas être atteint par les tirs venant du boulevard Bugeaud, ce qui fut le cas pour des soldats atteints par les balles de leurs camarades.Au bout de ce qui me semble une éternité, les tirs s’espacent puis s’arrêtent. Un silence pesant s’abat quelques secondes sur une odeur de poudre et de poussière puis des cris de douleurs, des gémissements, des hurlements montent de partout.

Je me relève au milieu des corps déchiquetés, de blessés couverts de sang, de personne indemnes comme moi mais hagardes. Je me tâte partout : incroyable mais je n’ai rien ! par contre mon collègue Yarendji a les jambes couvertes de sang. Très rapidement je constate qu’il a pris une balle en séton dans la fesse mais il arrive à se relever. Je relève également une jeune fille qui saigne du ventre et se plaint doucement. Nous gagnons à 20 mètres à droite l’entrée d’un immeuble. Un tirailleur musulman est là, hagard, le fusil à la main. Je lui dis en arabe « au nom de Dieu qu’as-tu fait ? ». Il me répond « je te jure, je n’ai pas tiré, regarde mon fusil il est froid ! » et effectivement le canon de son MAS 36 est froid : lui au moins n’a pas participé à la tuerie.

Nous entrons dans le cabinet d’un chirurgien dentiste. La jeune fille s’affaiblit de plus en plus, en raison sans doute d’une hémorragie interne et meurt rapidement dans mes bras alors que je tentais d’apaiser son angoisse par des paroles, hélas dérisoires, que l’on peut prononcer en pareil cas. Je décide d’emmener mon collègue Yarendji à pied vers la clinique Lavernhe pas très éloignée, après que nous lui ayons posé un pansement provisoire. Dehors c’est un vrai champ de bataille : des corps inertes, des blessés, du sang, des vêtements, des rescapés hébétés ou servant de secouristes bénévoles aux secours rapidement arrivés sur place (les premiers ont essuyé les tirs des militaires) et qui continuent à affluer.

Les militaires ont été promptement rassemblés et retiré du périmètre.Après avoir déposé mon collègue à la clinique et pour rejoindre ma voiture garée loin du quartier, je dois encore passer devant les gendarmes mobiles et leurs blindés, les mains en l’air et sans un geste de trop !La suite est connue... les cadavres évacués à la sauvette et nuitamment de la morgue vers les dépositoires des cimetières sans que les familles y aient eu accès, les communiqués mensongers de l’Autorité Militaire prétendant que les unités avaient essuyé des tirs, l’absence de réponses aux questions des parlementaires, la publication d’un Livre Blanc aussitôt interdit, etc.…..etc.…..

Avec le recul du temps et l’accès aux archives après la prescription soixantenaire, les historiens établiront, je l’espère, le récit exact de cette journée honteuse qui vit l’Armée Française tirer sur des civils désarmés et porteurs du drapeau national qu’ils auraient dû défendre et honorer ensemble. La corrélation sera sans doute faite entre les événements sans lien apparent dont nous n’avions pas soupçonné qu’ils aient pu être, hélas, annonciateur d’un carnage prémédité.

Yves AMIZET 2 Place Bichat 39 000 Lons le Saunier.

Un lieutenant, son pistolet à la main, crie "halte au feu".



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VI - Les témoignages - Grande Poste les manifestants

3 - FERRER CERDAN Jean-Pierre : des personnes au regard hagard, en larmes, erraient, perdues, déboussolées

LE 26 MARS 1962 : RUE D'ISLY
(Extraits)

Comme une traînée de poudre l'information avait circulé. D'un commun accord entre les copains du quartier, Européens et Musulmans nous avions décidé de nous joindre à cette manifestation.(Je me demandais quand les Algérois travaillaient tant il y avait de manifestations, cortèges et autres réunions ...). Ma sœur, Marie Françoise, âgée de 15 ans et demi, s'était jointe à nous, et, moi-même je n'avais pas encore 17 ans. Elle était la seule fille du groupe.

Nous descendions la rue de Mulhouse, insouciants et plaisantant comme il est bon de le faire à notre âge. Nous arrivions, place Lyautey, ce carrefour qui est l'aboutissement ou le départ du boulevard Saint Saëns, de la sortie du tunnel des facultés, de la fin de la rue Michelet et du début de la rue Charles Péguy. Cette dernière est intermédiaire entre la rue Michelet et la rue d'Isly. Nous longions les Facultés et l'Otomatic, brasserie mythique des étudiants algérois. Les autres brasseries très fréquentées par la jeunesse : Les Quat Z'arts, la brasserie des Facultés lui faisaient presque face . Au bas de la rue de Mulhouse à la sortie du tunnel des facultés, Jean-Paul Soler, D. de Ubeda et Paul Arfi se joignirent à nous.

Nous entendions la foule digne chanter la Marseillaise.

Une chenille immense descendait de la rue Michelet  avec des banderoles affichant notre détermination de rester Français sur une terre française. L'Algérie n'était pas une colonie ordinaire. L'Algérie, c'était la France. L'Algérie était découpée en plusieurs départements (.......... )

Les drapeaux Bleu Blanc Rouge apportaient de la couleur aux banderoles blanches. Comme à chaque cortège, les anciens combattants de 14/18 ou 39/45 ouvraient la marche et arboraient fièrement leurs décorations et médailles militaires, clairons et tambours en tête. dans la foule, jeunes, vieux, parents avec leurs enfants sur les épaules se tenaient au coude à coude . Il n'y avait pas que des Pieds-noirs, une population de toutes confessions se dirigeait vers Bâb el Oued. Courageux, car ce n'était pas la porte à côté, il y avait bien sept à huit kilomètres des Facultés à Bâb el Oued.

Notre petit groupe se joignit au cortège en faisant en sorte de rester tous les uns  près des autres.

Nous marchions sous les platanes déjà feuillus et y allions de notre plus belle gorge pour chanter et clamer des slogans hostiles aux vendeurs de l'Algérie et bienveillants à ceux qui nous défendaient.

En arrivant à hauteur du Coq Hardi, autre brasserie célèbre pour les inconditionnels du RUA, je fus surpris de constater que deux camions militaires étaient arrêtés perpendiculairement à la chaussée. Des barrières de fil de fer barbelés avaient été déroulées de telle manière qu'il était impossible de contourner les véhicules. Seule une ouverture existait entre eux, passage assez étroit, car également garni de barbelés et gardés par quelques soldats français, coiffés du képi de la Coloniale ou des Tirailleurs. Nous pouvions apercevoir, plus bas, d'autres camions kaki stationnés rue Monge. Le militaire chargé de nous laisser circuler, écartait à peine les barbelés, empêchant ainsi le cortège de les traverser trop rapidement. Au moment où notre groupe passa, le jeune métropolitain prononça une phrase qui depuis quarante ans est restée gravée au tréfonds de ma mémoire , je l'entends encore aujourd'hui  comme si j'y étais. Il dit le plus simplement du monde :"allez passez vite avant que ça ne commence ..." phrase anodine sur le moment, passée inaperçue  mais combien importante pour les minutes qui allaient suivre. Toujours ensemble, nous traversâmes le plateau des Glières. Aucun autobus n'attendait ses voyageurs. Dans le jardin, derrière les arrêts d'autobus, la statue de Jeanne d'Arc  nous regardait passer avec son épée dirigée vers le ciel ; elle semblait nous montrer le chemin.

Une chose nous avait complètement échappé : toutes les rues transversales qui accédaient à la rue d'Isly étaient fermés par des barbelés. Ainsi nous ne pouvions pas revenir par la rue Edouard Cat ou la rue Ballay ou le boulevard Laferrière sur notre gauche. Il en était de même à droite pour accéder à la rue Chanzy ou à l'avenue du 9ème zouave. (...)

Nous approchions de la Grande Poste à l'architecture néo-arabe avec sa dizaine de marches pour y accéder. En face assis à même le sol , devant la maison de la presse, je vis, sans vraiment y prendre garde non plus, une dizaine de militaires arabes, dans une tenue vestimentaire, qui ne ressemblait en rien à notre armée, même en treillis. Leurs casques aussi étaient différents des casques français, moins larges. Ils portaient juste au-dessus de la visière deux caractères blancs : W.III ou W.IV. Aucun militaire français n'avait d'inscription su son casque. La marque distinctive de son arme est mentionnée sur la médaille pendue au bouton de la poche gauche de sa chemise ou sur un écusson de tissu cousu sur sa manche. (...).

Des fusils mitrailleurs étaient posés devant eux, soutenus par leur trépied. (...)

Mon regard se dirigea inconsciemment vers les terrasses des immeubles. Ces constructions du début du siècle n'avaient que trois ou quatre étages. Des militaires armés y étaient postés nettement visibles....  Nous venions à peine de dépasser la Grande Poste quand les premiers coups de feu claquèrent. On nous tirait dessus. Une mitraillade très fournie.... Qui ? D'où? Des lapins ! Une cible d'une facilité enfantine .... (...) Nous courûmes, nous courûmes droit devant, mais pour aller où ? ...

(...) Ma tête était vide ...ma sœur .. où était-elle ? Je ne la voyais plus. Les armes crépitaient. Je m'arrêtai terrifié, cherchant derrière, à droite ou à gauche. Je levai la tête pour essayer de voir plus haut plus loin : elle était devant, avec une partie des copains du quartier. Elle courait plus vite que moi. Des hommes, des femmes, des enfants tentaient d'ouvrir les entrées d'immeubles pour se protéger. (...).

Nous courions toujours descendant la rue d'Isly. Nous passâmes le Milk Bar, la place du Maréchal Bugeaud sur notre gauche avec sa statue; derrière lui, les bâtiments de la Xème Région militaire. Nous traversâmes la place en diagonale et pénétrâmes dans un immeuble dont la porte était restée ouverte. Nous la refermâmes d'un coup sec et gravîmes un ou deux étages pour trouver un hypothétique abri : un appartement qui s'ouvrirait pour nous accueillir. Rien toutes les potes restaient fermées.

Nous étions tous là mais nous ne savions pas ce qui s'était exactement passé. Le calme, dehors, semblait revenir. Les coups de feu étaient moins fournis et paraissaient lointains. Nous redescendîmes au rez de chaussée pour sortir et revenir au quartier. Mal nous en prit car, alors que nous ouvrions la porte une salve partit de l'immeuble d'en face ou de la Xème Région et les balles s'écrasèrent sur le mur de l'entrée. Putain ! Tirer sur des gosses ! ... Il nous fallait encore attendre. Nous étions assis sur les escaliers de marbre usés  dans l'immeuble.

Le calme revint complètement. Nous tentons une autre sortie,  plus rien; plus un bruit; un silence assourdissant et pesant nous enveloppait. Tout était fini. Cela avait duré 12 minutes. Un siècle ! ...

Des personnes au regard hagard, en larmes, erraient, perdues, déboussolées. Elles cherchaient ceux avec qui elles étaient, il y a un instant. D'autres tiraient derrière elles des lambeaux de banderoles et des drapeaux maculés de sang.

Nous grimpâmes en courant les escaliers de la rue Généraux Morris sur notre droite. Ils rattrapaient la rue Dupuch. Nous nous dirigeâmes vers le boulevard du Télémly, les hauts murs du stade Leclerc s'élevaient en face de nous. A l'intersection de boulevard de Tassigny et du Télémly, près du Viaduc, quelques camions militaires étaient stationnés. Abrités derrière chaque roue, un genou à terre, armes au poing, des gardes mobiles semblaient encore attendre l'attaque d'un ennemi virtuel. Nous rîmes en passant près d'eux. Ils braquèrent vers nous leurs pistolets mitrailleurs t nous demandèrent si c'était fini.  (...)

De retour au quartier, des claquent nous accueillirent, mais il y eut aussi beaucoup de larmes de joie. Nous étions tous revenus sains et saufs. Toute la manifestation et les évènements avaient été retransmis en direct par Europe 1 et RMC ;  donc nos parents savaient ce qu'il s'était passé. Ils étaient restés les oreilles collées aux transistors, hébétés, impuissants.

Aux actualités du soir, aucune information sur ce terrible après-midi  ne fut diffusée par Europe ou par RMC. Les quotidiens et hebdomadaires nationaux furent censurés par le pouvoir gaulliste et retirés des kiosques.

Jean-Pierre FERRER - CERDAN
Saint Laurent du Var
5 février 2002
RECUEILS : extraits
Texte déposé

Sur une des photos, mon père , ma mère et ma sœur, sur l'autre, mon père sortant une bûche de Noël - 1960.

Sur la photo suivante le quartier où se trouvait  la boulangerie  :  elle est à l'intersection de la rue de Mulhouse, de la rue Danton et des escaliers  Cornuz qui montent au Télémly.

Les photos 2632 et 26332 sont extraites de l'ouvrage "Un crime sans assassins" . J'y ai rajouté le départ  "à partir d'ici" et l'endroit où nous nous trouvions , quand les tirs ont commencé à la hauteur de la rue Chanzy.

En haut de la photo, l'endroit où nous nous sommes réfugiés.

Les tirs sur nous sont donc partis de l'Etat Major ou des terrasses en face. On ne peut pas dire que ce sont les tirailleurs -ALN qui l'ont fait.

J'ai trois photos, reçues d'une amie (nièce de Watin, celui qui a loupé De Gaulle au Petit Clamart) de Montréal, qui habitait tout près de la Poste. Leur immeuble a été mitraillé. On voit nettement que les tirs ne pouvaient pas provenir de la foule, 3 ou 4 étages plus bas.

Jean-Pierre FERRER CERDAN - Nice 10 mai 2010

Sur l'une des photos mon père, ma mère et ma soeur - 1960

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Mon père sortant une bûche de Noël - 1960

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Photos de la boulangerie rue DANTON aujourd'hui

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Plan de notre quartier au dessus des facultés et de la rue MICHELET qui va vers la Grande Poste.

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Plan de mon départ pour la manifestation

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Plan de ma position au moment où la fusillade a commencée

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VI - Les témoignages - Grande Poste les manifestants 

4 - SAUCOURT Robert : et puis les tirs reprennent, nous nous couchons à nouveau
 

Le 26 mars 1962 j'avais 18 ans 1/2.

Les 24 et 25, à la demande de notre responsable de réseau, nous avons convoyé des vivres vers le quartier de Bâb el Oued.Le 26 au matin, nous découvrons le tract du colonel Vaudrey demandant de manifester notre soutien aux assiégés de BeO. Notre responsable nous met en garde contre une éventuelle provocation des autorités et nous dit d'éviter d'aller au contact des forces de l'ordre.
Nous sommes partis de chez nous (plateau Sauliere) vers la Grande poste en descendant la rue Michelet, noire de monde. Arrivés à la poste, des amis qui nous précédaient ont passé le barrage. celui-ci se ferme alors que nous arrivons.

J'étais en compagnie d'une amie, de sa mère, son beau-père et de quelques copains du quartier. Face au barrage nous essayons de passer, un militaire (musulman) pointe son fusil sur la mère de mon amie. Le ton monte et le lieutenant commandant la section vient à nous et fait relever l'arme du tirailleur. C'est un jeune homme blond, aux yeux bleus, que nous prenons pour un métropolitain. Nous saurons par la suite qu'il s'agit du Lt Ouchène Daoud, Kabyle.Nous parlementons avec lui pour obtenir le passage.Tout se passe, malgré quelques invectives au moment de l'incident avec le soldat, dans le plus grand calme. Nous sommes entourés de gens pacifiques, chantant la marseillaise ou les Africains, brandissant des drapeaux tricolores.Pendant la discussion, un vide s'est créé devant nous, les manifestants qui nous précèdent sont maintenant à plusieurs centaines de mètres dans la rue d'Isly. Entre eux et nous, plus personne. Seuls des militaires en arme sont sur les bords de la rue. Après quelques instants de flottement le lieutenant fait ouvrir le barrage et nous dit:"Passez, passez vite, j'ai des ordres..." Nous ne faisons pas attention à cette remarque et nous avançons.A hauteur de la rue Chanzy, nous voyons deux militaires servant un FM, AA52, bande de cartouches engagée, culasse tirée. Prêts à faire feu. Là nous commençons à nous inquiéter, car nous sentons la tension des tirailleurs. Aux regards qu'ils nous portent, nous ressentons leur haine. Quelqu'un dit de se dépêcher d'avancer, car il a l'impression qu'ils vont tirer. Nous parcourons quelques dizaines de mètres et la fusillade éclate. Certains pensent qu'ils tirent à blanc, mais très vite nous voyons des corps à terre, une femme, près de nous est couverte de sang. Alors nous courrons vers des abris précaires, les uns se jettent dans le caniveau, d'autres pénètrent dans les entrées d'immeubles. Lorsque les tirs semblent cesser, au bout de quelques minutes, nous sortons et nous apercevons les morts et les blessés.Et puis les tirs reprennent. Nous nous couchons à nouveau.Enfin, lorsque tout est terminé et que nous remontons vers la poste, nous voyons le carnage. Les morts, les blessés, le sang. Nous entendons les cris, les gémissements.En revenant vers chez nous, un hélicoptère survole la rue Michelet et largue des bidons d'un gaz au souffre, très puissant, qui était utilisé dans le djebel, en pleine nature, pour faire sortir les fells des grottes où ils se terraient. Ici, en plein centre ville, le résultat est épouvantable, une fumée jaunâtre se répand dans la rue, on tousse, on crache. Le résultat est que très vite la rue se vide.Quelques jours plus tard, vers 22 heures, entendant des bruits de moteurs vers l'entrée de l'hôpital de Mustapha (situé à moins de 100 mètres de notre immeuble), je monte sur la terrasse de l'immeuble avec mon voisin et une amie. De là nous voyons des half-tracks de la gendarmerie, ils sont positionnés au carrefour de la rue Denfert Rochereau et du Bd Beauprêtre. Des camions de l'armée sont stationnés dans l'enceinte de l'hôpital, devant l'entrée de la morgue, des soldats y embarquent les cercueils des morts du 26. Nous commençons à manifester. Des gens mettent des disques de chants patriotiques, on hurle contre cette macabre opération. Un agent de l'EGA coupe la lumière de la voirie. Le quartier est plongé dans le noir. Les GM balaient les façades des immeubles avec des projecteurs et ordonnent aux gens de rentrer chez eux sous peine d'ouverture du feu. Après une bonne heure de manipulation les camions repartent.

Robert Saucourt
47 rue Denfert Rochereau
Alger

Le gaz moutarde est un composé chimique cytotoxique, vésicants avec la capacité de former de grandes vésicules sur la peau exposée.

Il a été particulièrement utilisé comme arme chimique pendant la Première Guerre mondiale.

Sous sa forme pure et à température ambiante, c'est un liquide visqueux incolore et sans odeur qui provoque des cloques sur la peau. Il attaque également les yeux et les poumons.

Son nom vient d'une forme impure du gaz moutarde dont l'odeur ressemblait à celle de la moutarde, de l'ail ou du raifort. Il est aussi nommé parfois ypérite (dérivé du nom de la ville d'Ypres (Ieper) en Belgique où il fut pour la première fois utilisé au combat le 11 juillet 1917, moutarde au soufre, Kampfstoff LOST, ou gaz LOST. Il peut être létal mais sa première fonction est d'être très fortement incapacitant.

Ce gaz moutarde a ensuite utilisé en:

1918, par les Allemands à Verdun et dans la Marne

1919, par les Britanniques en Afghanistan[réf. nécessaire]

1925, par la Grande-Bretagne, sur la population, au Kurdistan (dans la région de Mossoul), par ordre de Winston Churchill

1925, par l'Espagne et la France pendant la guerre du Rif

1934-35, par l'Italie durant son occupation de l'Éthiopie

1934-44, par le Japon contre la Chine

1963-67, l'Égypte l'utilise dans la république arabe du Yémen

1983-1988, le régime de Saddam Hussein l'utilise contre les populations kurdes au nord de l'Irak. Le gaz a également été déployé durant la guerre opposant l'Irak à l'Iran.

Après la guerre du Golfe, plusieurs centaines de tonnes de gaz moutarde sont éliminées en Irak par l'UNSCOM.

Sur le front occidental, Joffre se fait fort d'user les troupes allemandes déployées face à lui et de percer leurs lignes en lançant de puissantes offensives. En 1915 six grandes offensives sont donc lancées par les alliés : deux en Champagne, trois en Artois et une sur la Woëvre. Celles-ci ne doivent pas occulter les nombreuses opérations dites "secondaires" conduites de part et d'autre du front comme en Flandres, sur le Chemin des Dames, en Argonne, dans les Vosges afin de procéder "à des rectifications du front" ou venant simplement en appui. Ces combats qui ont lieu, bien souvent, dans la pluie, la boue et le froid, consistent à prendre une hauteur, reconquérir une position perdue. Au-delà de ces actions d'usure dans laquelle la guerre des mines joue un rôle important, sans peser réellement sur le cours des événements, Joffre cherche en vain à renouer avec guerre de mouvement. Les Allemands, solidement retranchés, résistent aux desseins français, parfois au prix de lourdes pertes mais toujours avec succès, en utilisant si nécessaire de nouvelles armes comme le gaz. En effet, le 22 avril 1915, prés d'Ypres, ils lâchent dans l'atmosphère 150 tonnes de chlore. Poussé par le vent, le nuage dérive vers les lignes alliés. Chez les Français, essentiellement les Bretons et Normands du 10e CA, c'est la débandade, les corps de centaines de soldats asphyxiés se mêlent aux milliers d'agonisants.

Cette première attaque aux gaz intoxique 5 200 soldats qui mourront dans les heures suivantes : les 73e, 74e, 76e, 79e et 80e R.I.T, le 1er régiment de tirailleurs Algériens, le 2e régiment de Zouaves, les Belges et les Canadiens.

source : Wikipédia 

 

 plateau sauliere1

 

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