4.7 - Les Français d'Algérie témoignent en Espagne

XII - 50 ans après - Témoignages

1 - Témoignage d'Omar TARAB 29 avril 2012 : son courrier à François Hollande - et sa réponse à un ex-ministre algérien 3 juin 2012

2 - Jo TORROJA témoigne lors de la commémoration du cinquantenaire 1962 - 2012 les 5 et 6 octobre 2012 à Alicante dans le cadre de Mémoires d'un exode.

 

 

 

1 - Témoignage d'Omar TARAB : son courrier à François Hollande

29 avril 2012

Ma réaction après avoir pris connaissance de la lettre adressée par François Hollande à des expatriés d'Algérie

"Bonjour,

Je suis socialiste dans l'âme et par voie de conséquence vous comprendrez aisément pour qui mon cœur bat dans ces élections  2012.

Permettez-moi de me présenter : Algérien d'origine, français de culture et espagnol d'adoption, pays qui m'a accueilli quand, assailli par les assassins islamistes, durant la guerre civile en Algérie, j'ai quitté à mon cœur défendant, mon pays natal.

J'ai noué, depuis mon exil, des relations avec des ex-compatriotes, partis aussi malgré eux en 1962 dans des conditions aussi dramatiques qu’inhumaines, ceux-là même qui ont fait la grandeur de ce pays.

D'ailleurs c'est sur ce sujet que je veux m’adresser au candidat François Hollande, après qu'il ait envoyé  à des  expatriés  d’Algérie,  une lettre dans laquelle il atteste, s' il est élu président, de demander pardon au pouvoir Algérien et reconnaitre les tueries  perpétuées par l'armée française en 1945 à Sétif (Algérie) et par la police française en 1961 à Paris.

Sincèrement je reste sans voix, vous voulez demander pardon à qui Monsieur Hollande ?

A des imposteurs qui se sont hissés au pouvoir sur les corps de plus de 4.000 citoyens, froidement abattus en  l’été 62,  qui tentaient bravement de s'interposer à cette horde sanguinaire provenant des frontières Algéro/marocaine, portés par l’espoir de pouvoir instaurer un état  démocratique et laïque sur cette terre d’Algérie ?

Demander Pardon à ceux qui ont, en cette même  période, permis à des milices armées par leur soins, de massacrer des milliers de civils chrétiens  et harkis ?

A des usurpateurs qui continuent, encore aujourd'hui, à spolier  les richesses du pays à leur profit ?

A ceux qui ont basculé tout un pays, jadis riche et prospère, dans la paupérisation sociale et morale ?

Aux alliés des terroristes et des fanatiques islamistes, auteurs de plus de 200.000 morts dans cette tragédie de la décennie 90 ?

A des  assassins, qui au printemps 2001 ont mitraillé 126 jeunes lycéens kabyles qui revendiquaient  pacifiquement la liberté, sans oublier les 850 tués lors du soulèvement de 1988 ?

A cette oligarchie qui instrumentalise la religion pour bâillonner son peuple tout en interdisant aux chrétiens autochtones (surtout kabyles) de vivre leurs religions ?

Ou alors à ceux qui ont détruit tout ce que les vrais enfants d’Algérie partis en 1962 ont édifié comme valeurs et progrès social ?

Persister dans cette démarche, Monsieur Hollande, c’est faire mettre la France entière à genoux  devant les  tenants de l’injustice, de l’intolérance et de l’oppression et ne croyez guère avoir la reconnaissance du peuple algérien en adoptant cette mesure, bien au contraire vous contribuerez à donner à ces tyrans encore plus de crédit, au moment où  le peuple aspire  à se débarrasser, à tout jamais,  de leur joug.

Cordialement,

Omar Tarab - Consultant/Écrivain" - Espagne.

 

et sa réponse à un ex-ministre algérien 3 juin 2012

 

Ma réponse à un ex-ministre du système algérien, journaliste à ses heures perdues qui a publié un article sur Le soir d'Algérie du samedi 2 juin, incriminant la mauvaise situation du pays aux nombreux envahissements suivis d'occupations qu'a connu l'Algérie. Plus hypocrite  que ça on meurt.

Omar Tarab

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A: Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Sujet: votre écrit du 03 mai 2012
Date: Sun, 3 Jun 2012 08:38:07 +0000

Bonjour Monsieur,

J'aurais aimé que vous soyez plus conséquent avec vous-même, quand par exemple, dans votre article, vous citez les forces   étrangères qui ont dans le passé occupé notre pays, j'ai constaté que vous avez passé sous silence l'occupation  arabe, qui fut l'une des plus violentes et cruelles qu'ait connu l'Algérie ...

Par la même il aurait été à votre honneur d'énumérer l'apport civilisationnel introduit déjà par les Romains ce qui a permis à beaucoup de nos concitoyens de l'époque de connaitre les universités romaines, tel le fils de Jugurtha, devenu avocat et de Lapulée, auteur de l'ouvrage "Ane d'Or"  écrit bien entendu en latin (qui se trouve actuellement  à la bibliothèque de France) entre autres et dire aussi que c'était la seule puissance occupante qui a octroyé de facto le statut de citoyenneté aux autochtones égal à celui de ses propres citoyens.  A cette même époque la Numidie participait aux jeux olympiques qui se tenaient régulièrement à Athènes, pour dire le degré de l'émancipation des habitants de la région à une date ou un grand nombre de pays européens n'avaient pas encore accès à l'école.

Je vous demanderai également de ne pas jeter le voile sur ce que a apporté la France à l'Algérie en un siècle, nous devions avoir l'`honnêteté morale et intellectuelle de reconnaitre qu'elle nous a légué un pays structuré, organisé, une école performante et un tissu industriel constitué de petites et moyennes entreprises qui subvenait aux besoins du pays, sans parler de l'agriculture et de l'élevage, et  surtout  l'édification d'une société dans des normes civilisationnelles qui inscrivait l'homme dans la modernité et le progrès.

Vais-je vous surprendre en vous disant que des forces occupantes  les ottomans et les arabes ont été les plus nuisibles à l'Algérie ? Je ne le pense pas, cela serait faire insulte à votre intelligence, mais si seulement toute cette intelligence, la vôtre mais aussi celles de tous les enfants  d'Algérie, indépendamment de la race et de la religion  s'unissaient pour booster le pays vers la lumière, le faire sortir des ténèbres où des soudards d'un autre âge l'ont amarré depuis 50 ans en commençant par détruire le temple du savoir  afin d'accomplir leur forfaiture, érigeant ainsi un  peuple servile et inculte.

Ne nous trompons pas de cible, le mal qui ronge le pays nous l'avons localisé depuis fort longtemps, c'est notre lâcheté et notre cupidité qui refoulent  ce besoin de liberté.

Je termine par ce poème de Victor Hugo, dirigé contre la dictature imposé par Napoléon III.

"Malheur à qui prend ses sandales,
Quand les haines et les scandales

Tourmentent le peuple agité.
Honte au penseur qui se mutile

Et s'en va, chanteur inutile,
Par la porte de la cité."

Cordialement,
Omar Tarab

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2 - Jo TORROJA témoigne lors de la commémoration du cinquantenaire 1962 - 2012 les 5 et 6 octobre 2012 à Alicante dans le cadre de Mémoires d'un exode.

Oran 28 juin 1962

Je ne sais combien de fois j'ai regardé ces deux bateaux espagnols, qui depuis avant-hier ont mouillé au large d'Oran. Le consulat de ce pays nous a promis que nous pourrions embarquer; seule manque l'autorisation d'entrer au port des autorités françaises, qui se refusent à l'accorder…. Pas d'ingérence étrangère dans l'évacuation.

… Et depuis la nouvelle de l'arrivée de ces deux bateaux, un flux de "réfugiés" a envahi le port, en voiture, en camion, avec des caisses, des boîtes, des "valises-ficelle" et même des meubles. Tous ces gens campent, s'entraident, s'organisent pour une longue attente. Cela commence à créer un problème aux autorités.

Quant à nous, depuis notre balcon, nous surveillons les deux navires. Pour le moment "ça" ne bouge pas.

29 juin

La masse des campeurs augmente sans cesse. Cela vient maintenant d l'intérieur des terres. Le consulat d'Espagne ne garantit l'embarquement qu'à ses seuls ressortissants, qui sont déjà près de quatre mille sur le terre-plein du port.

Les autorités françaises s'obstinent dans leur attitude négative. Depuis les navires des barques à moteur sont venues à terre faire l'approvisionnement. Ces deux  bateaux n'étaient venus que pour 24 heures. Ils sont là depuis trois jours maintenant. Cela commence à s'éterniser.

Enfin, à 18 heures, on nous confirme que les bateaux entreront demain. … Paris a cédé. Alors commencé le plus triste. Mais je ne veux pas en parler. A quoi bon … Après tout ce temps la blessure reste.

30 juin

6 heures du matin. La "Dauphine-Gordini", chargée au maximum, valises, boîtes, femmes et enfants, porte-bébé du dernier qui prend bien de la place; peut-être seulement tout ce que nos mains pourront porter, car on ne sait pas encore si on nous laissera prendre la voiture. Il a fallu laisser tant de choses …

Moteur en route … Le grand exode commence

Au port les bateaux accostent. Ce sont des "type-ferry". La foule commence à s'agiter. On empaquète, on plie, on attache, ça va, ça vient, ça crie, ça discute, ça piaille, ça bouge de partout. Le dernier casse-croûte. Certains sont là depuis 4 jours …

La longue procession des voitures commence à avancer vers les barrières déjà si encombrées. Ultime délicate attention : les autorités ont voulu nous faire passer une dernière fois à la fouille (!!!). Nos sympathiques CRS sont toujours là, toujours aussi avenants, gentils, attentionnés, aux petits soins pour nous vider toute la voiture. Même le porte-bébé y passe. Tout ça avec le sourire; ça fouille à pleines mains dans nos pauvres affaires, ça regarde sous la voiture. Tout le monde y a droit. C'est un des grands mystères du départ. Que peuvent-ils bien chercher ?

13 heures

Les bateaux sont bourrés. Tout le monde a pu y entrer; cela parait incroyable … Nous sommes tous restés sur le pont. Les derniers regards, les dernières photos, le dernier adieu. Les premiers pleurs.

… Les CRS veulent monter à bord. Le capitaine du bateau et les autorités consulaires s'y opposent. Les affreux insistent. Mais non rien à faire, le maître du bord est têtu, … il ne veut rien entendre, il clame que son bateau est territoire espagnol …Il semblerait que des gens appartenant à une certaine "Organisation" sont à bord …

Enfin, après maintes palabres et contacts radio, les passerelles sont retirées…   Les bateaux s'éloignent peu à peu des quais. Sur ceux-ci peu de monde, des forces de l'ordre surtout. … Moi aussi je m'en souviendrai toujours, ces hommes, ces femmes, ces enfants le regard fixé sur le boulevard "front de mer", sur la ville qui s'éloigne. Pas un mot, seulement ce regard qui veut tout prendre, tout saisir, emporter le maximum d'images …

La vie à bord s'organise; les marins sont aux petits soins … nous venons d'être pris en charge par deux navires de la Marine espagnole. Nous serons également  survolés par l'aviation militaire plusieurs fois et escortés jusqu'au port d'Alicante.

Exceptionnellement nous entrerons au port à 2 heures du matin. …

Les autorités alicantines ont fait merveille; la Croix Rouge à bord ne nous a pas laissé porter une valise; boissons, sandwiches, aide pécuniaire, que sais-je encore, mille attentions … Et cela malgré la ville en fête (fête de la Saint Jean, dernière nuit  de juin).

Inoubliable réception, qui nous mit du baume au cœur. Merci Alicante. Nous n'oublierons jamais.

Jo TORROJA

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Feu d'artifice à Alicante octobre 2012

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