2.2 - L'accueil des exilés ces Français d'Algérie par la France et les politiques par Daniel Junqua

I - Une journée historique - L'exode

De Daniel Junqua - extrait d'une revue éditée à Marseille mais dont le nom est effacé

"Ce qu’il faut savoir pour les comprendre."

Que pensent-t-ils, ces jeunes dont la grande presse a tant parlé ? Comment les situer, les définir ?

Il ne s’agit pas d’en faire des gens à part, des êtres exceptionnels en bien ou en mal. Ce sont des jeunes comme tous les jeunes de France, avec les mêmes problèmes fondamentaux. Mais ils ont vécu des événements exceptionnels qui les ont profondément marqués. Les quelques observations qui suivent ou permettront de mieux les comprendre.

La nostalgie d’un cadre de vie.

Le « Pied-Noir » est un méditerranéen. Cela se remarque à sa façon de parler, de s’habiller et même de penser. Il est exubérant, il accorde beaucoup d’importance aux apparences, à l’extérieur. Il vit en effet surtout dehors. Dans son pays, le soleil est roi et la mer est là, toute proche. La majesté de la baie d’Alger, la grandeur sauvage des mondes de Kabylie, la sérénité des ruines de Cherchell, autant d’images qui restent à jamais fixées dans les mémoires et dans les cœurs.

Mais plus peut-être qu’un climat ou que des sites, c’est un certain style de vie, des amis, des habitudes, que le « Pied-Noir » a perdu. Tout cela sera embelli encore par l’éloignement dans le temps et l’espace.

Des images.

Chacun d’entre eux porte en soi un certain nombre d’images douloureuses ou hideuses qu’il faudra beaucoup de temps et de patience pour oublier : bombes explosant dans des cafés ou agonie d’un des autobus au moment où l’affluence est la plus grande, homme mortellement atteint d’un coup de pistolet au détour d’une rue, magasins éventrés par des explosions. On ne vit pas impunément durant des années dans un univers où règnent en maître la peur, la violence et la haine.

Des réflexes.

Dans ce climat de violence, les « Pieds-Noirs » ont acquis un certain nombre de réflexes. Certains sont superficiels et s’effaceront vite, tel le fait d’ouvrir son sac ou son cartable lorsqu’on entre dans un magasin afin que l’employé qui se trouve à l’entrée puisse fouiller et vérifier qu’il ne contienne rien de suspect. D’autres réflexes seront plus longs à disparaître. Il faut beaucoup de temps pour réapprendre à vivre normalement, pour ne pas se jeter à terre au moindre bruit insolite, pour ne pas se défier de l’automobile qui vous suit, du passant que vous croisez et qui a une main enfouie dans la poche. Il faut du temps pour réapprendre la confiance, pour ne pas hésiter à dire que l’on ce que l’on pense ou à discuter avec quelqu’un que l’on ne connaît pas.

Des sentiments.

À l’âge où l’on apprend d’ordinaire l’amour et la confiance, ces jeunes d’Algérie ont appris à connaître et à pratiquer la haine et la méfiance. Mais la situation exceptionnelle où ils étaient placés à développé en eux d’autres sentiments : comme dans toute minorité menacée, l’esprit de solidarité s’est développé. Devant les dangers communs, tous les membres de la communauté se sont rapprochés, ce qui présente à la fois des avantages et des inconvénients : des avantages car cela a aboli les barrières sociales et a relégué au second plan l’individualisme, mais aussi des inconvénients car cela a amené souvent la création d’un esprit de clan.
Cet esprit de solidarité a souvent fait naître l’esprit d’entreprise. Les jeunes « Pieds-Noirs » ont essayé de se rendre utile et y ont souvent réussi assurant même à l’exécution de certains services municipaux défaillant. La situation d’exception qu’ils ont connue à développer en ne le goût de l’action, le sens de l’organisation des responsabilités.

Des idées.

L’Algérie pendant sept ans a été en guerre. En tant que français, les jeunes « Pieds-Noirs » se sont trouvés dans l’un des camps en présence. Ils ont adopté un certain nombre d’idées politiques qui justifiaient le combat qui était mené. Pour eux, l’ennemi était celui qui s’attaquait aux leurs. De cela résulte des idées politiques d’autant plus profondes, enracinée que, durant sept ans, les habitants de l’Algérie ont été soumis à une propagande intensive. Citons simplement le sentiment d’administration pour l’armée, comme c’est le cas dans tout pays en guerre.
Voilà, maladroitement et brièvement résumées, quelques-unes des clés qui vous permettront de mieux comprendre ces nouveaux venus que vous côtoyez peut-être déjà. Par certains côtés, ils sont déjà adultes. Il leur reste encore le temps peut-être d’apprendre à être des adolescents comme les autres. Il leur reste à connaître la spontanéité, la confiance, l’amour et l’amitié.
Quand on quitte a 15 ans, un pays où l’on est né et où l’on a toujours vécu, on n’est pas « un rapatrié », on est un exilé. Il faut que ces exilés, dans la mesure où ils choisiront de rester en France, puissent discerner un avenir possible. Il faut qu’ils retrouvent un équilibre. Il faut pour cela qu’ils aient naturellement leur place dans leur nouveau cadre de vie.

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