3.4 - Masseube 30 juin 2012 : Colloque " La transmission de la mémoire des Pieds-Noirs"

4 - La question des réfugiés comme conséquence de la violence politique.
Les réfugiés sont l'incarnation d'une redéfinition de limites amies ennemies.
Le massacre d'Oran ou la question des disparus, ont considérablement contribué à bien faire comprendre aux populations concernées ces limites. Ces opérations n'ont rien de spontané mais furent savamment orchestrées. En Algérie, le nouveau ciment arabo-islamique s'est imposé pour définir la limite des amis. Les autres populations n'étaient pas ou plus chez elles. Peu importait l'antériorité des générations présentes sur cette terre. Il est d'ailleurs assez singulier de voir développer notamment par certaines personnes de confession juive, l'idée qu'il eut une erreur de « casting ». C'est oublier les pogroms de 1934 à Constantine. Cette notion s'est tellement imposée que certains représentants de l'église catholique iront même jusqu'à parler de « terre d'Islam ».

Avec le temps, et après cinquante ans de recul, il est évident que la question amis-ennemis n'était pas pour les « combattants de la liberté » une question politique mais la nécessité d’une épuration ethnique. L'analyse des massacres du 20 août 1955 de Roger Vétillard apporte en cela des éléments de preuves incontestables.

Pour Paul Dumouchel, « La violence prive les agents de la possibilité de choisir. Les victimes, mais aussi les autres qui sont appelés à se reconnaître dans la violence ne sont pas invités à participer au propos que la violence politique tient sur le monde. Ils y figurent uniquement sous la forme d'objets qu'il s'agit de manipuler, jamais comme personnes, c'est-à-dire jamais comme interlocuteurs égaux. Il y a, dans cette dimension performative de la violence une parenté conceptuelle certaine avec le mensonge qui lui aussi refuse à l'autre d'être un interlocuteur égal, le manipule, le réduit au statut d'objet. De plus, de même que la violence, le mensonge a une dimension performative essentielle. Lui aussi aide à transformer le monde. Soit de façon très locale, en manipulant le comportement de l'autre grâce à la fausse information qu'on lui transmet. Soit de façon plus globale, en particulier dans le domaine politique le mensonge très souvent consiste à nier systématiquement l'existence d'une situation ou d'un état de fait. La conséquence du mensonge est alors de hausser les enchères en forçant l'autre soit à un désaccord, mais qui semble injustifié et sans raison, soit à faire « comme si » il n'y avait rien ou rien eu, donc à consentir au mensonge et à faire en conséquence que ce qui fut, en un sens n'ait jamais été. Tout comme la violence le mensonge change le réel en refusant de reconnaître l'égal statut moral de l'autre ».

Il reste important de replacer les victimes au centre des réflexions et de lever le voile à partir d'elles sur la réalité historique.

Georges Belmonte

Extraits du Supplément du n°139 de L'Algérianiste.

01

02

"Qui répondrait en ce monde à la terrible obstination du crime si ce n'est l'obstination du témoignage?"
"Justice et haine" - Albert CAMUS
Inaugurée par Nicole GUIRAUD,victime du terrorisme FLN à Alger 30/09/1956.

03

 Retour Sommaire

Informations supplémentaires