7.7 - OAS. Témoignages

III - Histoire et récits - L'O.A.S.

6 - Témoignage d'Eric DERRIEN pour son père Yann DERRIEN - 29 décembre 2013 - "... conduit pour interrogatoire  à la caserne des Tagarins où sévissaient les tortionnaires du sinistre Debrosse "

Décédé le dimanche 29 décembre 2013 à 14h00.

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 TEXTE LU A L'EGLISE

Quelques passages de la vie de Yann Derrien – 85 ans
Les parents de Yann étaient directeurs d’écoles primaires en Algérie. A l’occasion de leurs vacances annuelles dans la famille de Bretagne, Yann voit le jour à l’île Tudy le 9 juillet 1928. Il passera ensuite 33 années en Algérie.

Il a vécu la 2ème Guerre mondiale à Alger, dont notamment le débarquement américain du 8 novembre 1942 et les bombardements allemands en représailles.

Atteint de tuberculose en 1942, il reste alité plusieurs mois et se découvre une passion pour la lecture et l’histoire. Après la guerre, il achève ses études d’ingénieur avicole et monte son exploitation à Chéragas près d’Alger.

En 1954, âgé de 26 ans, il vit le début de la guerre d’Algérie. En 1956, il est requis par l’armée française, tout en continuant son activité civile. A partir de ce moment, il participe avec intensité aux évènements dans le cadre du Dispositif de Protection Urbaine et du Groupe de Renseignements et d’Exploitation. Il sera décoré à titre militaire de la Croix du combattant et de la médaille commémorative de la Guerre d’Algérie.

A l’issue de la guerre d’Algérie, il perd tous ses biens et est contraint de s’installer en France. Profondément meurtri, il repart à zéro. Il travaille en tant que directeur d’exploitation chez Guyomarc’h à St Nolff, aux élevages Bettina, puis au Père Dodu à Malansac. Il rencontre Laure et se marie en 1966. De cette union naîtront 4 enfants :

Eric, Annie, Luce et Cécile. Puis la famille s’agrandit avec les conjoints et 10 petits enfants.

En 1970, il décide de créer un élevage de lapins reproducteurs et s’installe à Kergurun en Languidic, maison où il passera le reste de sa vie. En 1974, il crée l’Association des Producteurs de lapins du Morbihan dont il assure la présidence.

Il prend sa retraite en 1990 à l’âge de 62 ans et poursuit alors des activités bénévoles. Il adhère ainsi à l’association ECTI dont le but est de transmettre les savoirs faire et expériences de professionnels seniors. Il intervient pour des missions de conseil qu’il effectue dans le cadre de la FAO, l’organisation des Nations Unis pour l’alimentation et l’agriculture. Il se rend ainsi dans plusieurs pays et fera deux missions au Maroc, deux en Tunisie, une en Côte d’Ivoire, une au Sénégal et neuf missions en Chine.

Il participe également aux activités de plusieurs associations d’anciens combattants, dont notamment l’UNACFME visant à soutenir les Harkis. Il recevra en remerciement la Médaille du Djebel et la Croix du Sud.

Après quelques années, sa santé ne lui permettant plus d’être aussi actif, il se consacre pleinement à ses passions de toujours que sont la littérature et l’histoire.

Après cette vie bien remplie, Yann s’est éteint chez lui, aux côtés de sa femme, comme il le souhaitait.

 

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TEXTE LU AU CIMETIÈRE

Yann était mon ami depuis plus de 50 ans...

Notre première rencontre date de 1962, c'était à la prison de la Santé quartier politique, où nous avait conduit notre résistance à la politique d'abandon décidée par un président-général de guerre civile.

Yann était un Homme debout, il ne se livrait pas beaucoup, mais je savais son amour pour cette terre d'Algérie Française où il avait choisi de s'installer, non pour y faire fortune et ensuite, s'en retourner en métropole. Il était venu pour y vivre, s'y fixer définitivement, pour que ses enfants après lui y demeurent...!

La trahison d'un chef d'état parjure en a décidé autrement...

Parallèlement à ses activités professionnelles, il fait partie, sous les ordres du Colonel Godard de ceux qui traquent les poseurs de bombes pendant la "Bataille d'Alger", il est de ceux qui ont réussi à démanteler le réseau des terroristes qui faisaient exploser des bombes dans le centre-ville d'Alger.

A la suite de la tentative de révolte, connue sous le nom de "Putsch des généraux", le 22 avril 1961, il rejoint l'OAS et, toujours sous les ordres du Colonel Godard, s'engage dans l'action clandestine. Yann n'était pas de ceux qui dissimulent leur drapeau dans leur poche...Il défendait avec détermination ses convictions "Algérie Française" !

Repéré par les barbouzes gaullistes, il fût arrêté et conduit, pour interrogatoire à la caserne des Tagarins, où sévissaient des tortionnaires sous les ordres du sinistre Colonel de gardes mobiles Debrosse. Il a résisté à la torture et n'a rien dévoilé sur son réseau...

Embastillé à la prison de la Santé, jugé, et condamné par un tribunal militaire, aux ordres du pouvoir félon, pour avoir voulu défendre notre terre ..., il devait rester quatre longues années* derrière les barreaux.

Après avoir recouvré la liberté, il choisit de s'établir avec sa maman dans cette Bretagne où il poursuivra le combat, en prenant la défense de la communauté Harki. C'est à son Honneur d'avoir été aux cotés de ces hommes, abandonnés par la France gaullarde, aux mains des gens du FLN, qui leur firent subir des tortures d'une barbarie innommable... Quelques 100.000 Harkis furent massacrés après le cesser le feu unilatéral, pendant que l'Armée française, sur ordre express du gouvernement d’abandon, acceptait de rester consignée dans ses casernes...

Yann, nous avons fait ce qu'il convenait de faire, au moment où il fallait le faire..!!

Que Dieu t'accueille auprès de Lui, avec bonté et miséricorde. Il sait que tu n'as jamais été un tiède...

Tu rejoins la longue cohorte de ceux qui ont su dire NON au lâche abandon d'une terre Française, NON à l'imposture, NON à la trahison de la parole donnée !

A Dieu Yann !

* NDLR : Condamné à 2 ans, du 08/11/61 (Arrivée à la Santé) au 08/11/63, Yann aura fait 6 semaines supplémentaires de prison politique à Alger du 27/09/61 (Arrestation) au 07/11/61.

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