6.16 - Le Sous-Lieutenant Gilbert Palvadeau : " je suis un gaulliste inconditionnel " ou l'assassinat de Noël MEI récompensé

III - Histoire et récits - Mars 1962 : Barbouzes, tortures, attentats, enlèvements, charniers

1 - "Souvenir pour notre copain"  par Jean Pierre Bartolini et José Merciecca (extraits) -  L'assassinat de Noël MEI le 19 Janvier 1962   Bône (A.F.P.)

2 - Des milliers de Bônois déposent des gerbes à l'endroit où le jeune Noël a été tué

3 - La Dépêche d'Algérie : mardi 23 janvier 1962 - Le tract O.A.S. Bône

4 - Témoignage de Roger Miralles, rapporté par sa fille Stéphanie Cuello  - vendredi 21 août 2015

 

 

 1 - "SOUVENIR pour NOTRE COPAIN"  Par Jean Pierre Bartolini et José Merciecca (extraits  )  L'ASSASSINAT DE NOËL MEI, le 19 Janvier 1962   (BÔNE (A.F.P.)

Le 19 Janvier à 18 h. 45, le S-Lieutenant PALVADEAU Gilbert, Substitut du Procureur militaire attaché au Général Cdt la Z. E. C., apercevant deux jeunes garçons qui collaient des affiches, arrête sa 2 CV, dégaine son revolver et tire à plusieurs reprises, tuant d'une balle au cœur Noël MEI, âgé de 14 ans et blessant son compagnon âgé de 16 ans.
Son meurtre accompli, l'Officier se rend comme à l'accoutumée au Mess pour y prendre son repas
.

(Sur cette dépêche de l'AFP, il y a erreur sur l'âge respectif des adolescents) TRACT O.A.S.-BÔNE du 20 Janvier 1962

Dans la soirée du 19 Janvier 1962, à Bône un individu, surprenant deux gamins en train de coller des affiches " Algérie Française", tua l'un et blessa l'autre à coups de pistolet. Ce n'était pas un apache, car il portait l'uniforme de sous-lieutenant de l'Armée Française et les insignes de la Justice Militaire; il n'était pas ivre non plus. Personne ne le connaissait pour s'adonner aux stupéfiants, et sa situation même supposait un certain équilibre moral et nerveux.
M. PALVADEAU, de son nom, était seulement " GAULLISTE INCONDITIONNEL"


Cette opinion qui n'en tolère aucune autre a suffi pour qu'un homme plus que tout autre astreint aux disciplines civiques par sa double condition d'officier et de juge, TUE, froidement, un adolescent et en blesse un autre qui osaient afficher des sentiments non conformistes. On croit vivre un cauchemar et l'on veut penser pour la dignité humaine que cet assassin a agi dans un moment d'aberration pour s'effondrer ensuite sous le poids du remords...

Pas du tout. M. PALVADEAU, son crime commis, est allé ……... dîner !
Ainsi, s'est-il montré digne de son maitre, dont l'orgueil messianique n'est troublé par aucun sentiment humanitaire.

Qu'importe la douleur d'une mère. Qu'importe que l'ignominie de son acte soulève la colère et risque de contribuer à élargir jusqu'à la haine certaine incompréhension entre Français sur cette terre d'Algérie ! Sa conscience est tranquille, intoxiquée par les mensonges de ceux qui pour raffermir leur pouvoir, veulent faire oublier un problème au lieu de le résoudre et pour atteindre leur but, mettent tout en œuvre, pour dresser un pays contre ses propres enfants. Français d'Algérie, vous vous êtes battus pour la seule France à Cassino, à Colmar et ailleurs. Vous continuerez dans cette voie, à travers vos deuils, les injustices et les provocations. L'acte inqualifiable d'un sectaire ne déshonore que lui-même et ses maîtres. La gloire de l'Armée Française est bien au dessus d'eux.  Bientôt elle les vomira.

NB. - Monsieur PALVADEAU, si vous lisez ces quelques lignes, remarquez que nous parlons déjà de vous AU PASSE.

 

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III - Histoire et récits - Mars 1962-C'était tout ce poids dans la tête...

2 - DES MILLIERS DE BÔNOIS DÉPOSENT DES GERBES A L'ENDROIT OU LE JEUNE NOËL MEI A ÉTÉ TUE.

Après le tragique assassinat qui coûta, la vie au jeune Noël Mei, 16 ans, tué par le sous-lieutenant Gilbert Palvadeau, (originaire de Villejuif, où il habite, 13 passage des Réservoirs), une vive effervescence se manifesta en ville européenne, samedi. Durant toute la journée de samedi, Bône a donné l'aspect d'une ville morte. Elle s'était renfermée douloureusement sur son deuil. Les magasins étaient fermés. Les cinémas n'ont pas donné de représentations. Bône, au cours de la journée, s'est rassemblée devant le mur où était mort la veille le petit Noël Mei.

A l'endroit où fût tué le jeune colleur d'affiches, des gerbes de plus en plus nombreuses furent déposées. Ce sont les sœurs de la Doctrine Chrétienne qui, les premières, posèrent un bouquet. Sur un mur furent apposés des drapeaux tricolores, des portraits du général Salan, du Maréchal Juin et du Bachaga Boualam ainsi que des affiches de l'O.A.S.
Cependant tandis que l'inscription " Noël Mei, mort pour l'Algérie française " était tracée en lettres noires et rouges, une foule, sans cesse grandissante, vînt se recueillir à cet endroit là. Un service d'ordre important prit place aux alentours. De temps à autre des slogans étaient lancés : " O.A.S. au pouvoir ", " Vive Salan ", " Algérie française ", et le " Chant des Africains " et " La Marseillaise " étaient entonnés par l'assistance. Au fur et à mesure que les heures passaient, des fleurs, en couronnes, en gerbes, en bouquets, étaient déposées autour du portrait du jeune garçon.
Dépôt de gerbes de fleurs émouvant, angoissant parfois, devant ce mur qui devenait pour l'occasion comme un monument aux morts.
Mais sans doute le moment le plus bouleversent de la journée fût lorsque arriva le frère de la victime, à qui avait été accordée une permission spéciale de 48 heures, pour venir de Douéra où il est interne.

Dimanche matin, pour éviter le retour d'incidents qui, la veille, avaient fait un mort et un blessé à la suite du mitraillage de la foule par une voiture de terroristes, les attroupements furent interdits. Et la foule se contenta de défiler dans le lourd silence que font les profondes tristesses.

A Bône, à l'emplacement où le jeune colleur d'affiches Mei avait été tué par le sous-lieutenant PALVADEAU, des fleurs qui avaient été déposées ont été piétinées par deux militaires qui frappèrent des jeunes gens. L'intervention de quelques civils mit heureusement fin à cet incident.

 

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3 - La Dépêche d'Algérie : mardi 23 janvier 1962 - Le tract O.A.S. Bône

** VINGT MILLE BÔNOIS ONT ASSISTE DANS LE CALME AUX OBSÈQUES DE NOËL MEI  ASSASSINE VENDREDI DERNIER

BÔNE: - 2.0000 personnes ont accompagné à sa dernière demeure dans le calme et le recueillement, le jeune Noël Mei qui trouva une mort tragique, vendredi soir, tué d'une balle en plein cœur alors qu'il collait des affiches.

Bien avant 10 heures, hier matin, la population toute entière devait marquer sa sympathie pour cette jeune victime et une foule nombreuse se rendait rue Burdeau, devant l'humble logis de cette famille d'ouvriers tandis que la grève générale devenait effective à partir de 10 heures. Tous les magasins, les services privés et certains services publics avaient fermé leurs portes et la ville déserte était gardée par un service d'ordre très important, composé de gardiens de la paix, de gendarmes mobiles et de soldats. Des milliers de personnes ont accompagné hier, au cimetière, le corps du jeune Noël Mei. Jamais encore une foule aussi dense n'avait escorté un convoi funèbre.

L'hommage rendu au jeune homme venait de toutes les couches de la société qui se mêlaient dans ce long et triste défilé hommes femmes, enfants.  Ses camarades d'enfance, filles et garçons, auxquels s'étaient joints les élèves des autres écoles, portaient les couronnes et les gerbes de fleurs. On remarquait parmi ces couronnes celles offertes par ses camarades, par les associations patriotiques et par la Légion Étrangère.

Les jeunes gens, les jeunes filles, formaient en tête du convoi une longue théorie.
Sur les couronnes qu'ils portaient on lisait des Inscriptions telles que celle-ci : " De la part de ceux qui veulent comme toi rester Français ".

Tout le long du parcours que suivit le convoi mortuaire la foule était massée, triste et angoissée devant le malheur.Aux abords de la cathédrale c'étaient encore des milliers de personnes réunies qui avaient abandonné leurs occupations journalières pour être présents à la cérémonie. Le cercueil recouvert de tricolore fut porté jusqu'à la cathédrale par les camarades du disparu, sous la double haie formée par les drapeaux des associations patriotiques de Bône et des drapeaux des Anciens combattants. Le courant électrique qui avait été coupé en raison de la grève de deux heures, avait été rétabli à la cathédrale afin de permettre son illumination. Le cercueil fut placé au milieu de la nef tandis que les drapeaux prenaient place tout autour.

Avant de donner l'absoute, M. le chanoine Houche, archiprêtre de la cathédrale, prononça une émouvante allocution. Après la cérémonie à l'église, le cortège pris la direction du cimetière, mais au lieu de suivre l'itinéraire habituel, prit la direction de l'avenue de la 3éme D.I.A., passant ainsi devant la préfecture de Bône. Les assistants suivirent en masse jusqu'au cimetière, dans le calme le plus complet. La ville, durant le temps des obsèques, resta recroquevillée sur elle-même. Tous les magasins étaient fermés. C'était une immense communion avec ceux qui ,en ce jour de deuil, traînaient le douloureux calvaire de leur malheur.

D'autre part, hier après midi également, ont eu lieu les obsèques de la jeune Andrée Zammit, âgée de 17 ans, tuée dimanche matin par l'explosion de l'obus piégé placé par un terroriste, devant une boucherie. Une foule nombreuse assistait à la cérémonie. Aucun incident n'a été signalé.

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** (Tract) O. A. S. – BONE

C’EST BIEN LUI ! - L'ASSASSIN
L'assassin de Noël MEI
31 mars 1966

M. le Substitut du procureur de la République au Tribunal de Grande Instance de Troyes a l'air sévère. Pour ne pas dire l'air Inquiet. Comme s'il craignait que cette photo, prise lors de sa récente intronisation, tombe sous les yeux de quelque empêcheur de juger en rond. De MINUTE, par exemple ...!
Pourtant on aurait du mal à le reconnaître, M. le substitut Palvadeau. Après quatre ans ... ! Et tout s'était passé si vite ...

Il y a quatre ans, le 20 janvier 1962, à Bône (Algérie), le sous-lieutenant Gilbert Palvadeau, attaché au Parquet militaire, tuait froidement à coups de pistolet un jeune colleur d'affiches O.A.S. de 16 ans, Noël-Antoine Mei et blessait l'un des camarades du jeune garçon. Devant l'indignation générale, les autorités appréhendaient discrètement le sous-lieutenant meurtrier. Promis : on le jugerait....


Non seulement, en ne le jugea point, mais on l'envoya juger les autres à Djibouti !
Puis, l'oubli venu, pensait-on, Foyer le récompensa, sans tambour ni trompette en le nommant à Troyes. Où les criminels auront beau jeu de se lever, quand le substitut Palvadeau aura terminé son réquisitoire, et de crier :
- Et si l'on parlait du petit Noël-Antoine Mei, Monsieur le procureur ?

Source: http://www.piednoir.net/bone/titre_rubrique/nostalgie/noelmei.html

Le 19 janvier 1962, à Bône, un jeune garçon de 16 ans Noël Mei, avec l'un de ses camarades de classe, colle des affiches «Algérie Française » sur un mur.
Pour eux comme pour la grande majorité des jeunes Français, il s'agit bien sûr d'un acte civique mais également d'un jeu.Une 2 cv s'arrête et en descend le sous-lieutenant Gilbert Palvadeau, Substitut du Procureur militaire attaché au Général commandant la ZEC. Il pourrait tout simplement les admonester, à la rigueur les menacer de son arme de service afin de les impressionner et leur demander de déguerpir... et bien non, il sort bien son revolver et tire délibérément à plusieurs reprises tuant d'une balle en plein cœur Noël Mei et blessant son compagnon qui s'enfuyait.Son meurtre accompli cet officier FRANCAIS se rend tranquillement au Mess afin d'y prendre son repas.
Palvadeau n'était pas en état de légitime défense ni même menacé, sa seule excuse pour se défendre sera : « Je suis gaulliste inconditionnel ».

Il n'y eu pas de débordements, pas de manifestations hostiles à l'armée française, pas d'émeutes ni de voitures brûlées, pas de magasins défoncés et cambriolés, non, le lendemain Bône était « ville morte » et la population se contenta de défiler dans le silence et avec une profonde tristesse.

J'ai sous les yeux l'article de La Dépêche d'Algérie du 23 janvier 1962 :
« 20.000 personnes ont accompagné à sa dernière demeure, dans le calme et le recueillement le jeune Noël Mei tué d'une balle en plein cœur. La grève générale est devenue effective à partir de 10 heures. Tous les magasins, les services privés et certains services publics ont fermé leurs portes ».

Sur les centaines de couronnes on lisait : « De le part de ceux qui comme toi veulent rester Français ».

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Ce même après-midi on enterrait également la jeune Andrée Zammit, 17 ans, tuée par l'explosion d'une bombe placée devant une boucherie par un terroriste FLN et fabriquée par Timsit, un communiste « Français ».

Je vous conseille de vous rendre sur Google afin de voir le portrait de Palvadeau cet assassin.

Bien entendu Palvadeau n'a pas été jugé mais « très sévèrement puni » : nommé Substitut du Procureur de la République de Troyes. Imaginez une seule seconde si cela se passait de nos jours dans l'une des banlieues sur un « tagger » inscrivant sur un mur " JE NIQUE LA..."

 

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Portrait de l'assassin, devenu substitut du procureur de la République

 


III - Histoire et récits - Mars 1962-C'était tout ce poids dans la tête...

4 - Témoignage de Roger Miralles, un ami de Noël  rapporté par sa fille Stéphanie :  vendredi 21 août 2015

Bonjour,c'est avec émotion que je lis l'article consacré à Noël.
Mon père Roger Miralles était un de ses amis et garde un souvenir poignant du drame.
Dans sons portefeuille est toujours placée la photo de la tombe de Noël.
Merci.
Stéphanie Coello

Voici le témoignage de mon père:  lundi 24 août 2015

"La veille du décès de Noël, celui-ci m'avait demandé ainsi qu' à mon neveu Marius Nieri et à notre ami Gilbert Borge (dit Bébert), de l'accompagner comme nous en avions l'habitude, pour coller des affiches.
Étrangement, ce jour-là, j'ai refusé et j'ai dit à Noël que nous pourrions y aller ensemble un autre jour.
Mais Noël est parti le lendemain accompagné d'un ami.
Il n'est jamais rentré. Lorsque nous avons appris le drame nous nous trouvions avec une bande d'amis derrière le cinéma l'Olympia au palais loucheur.
Ce fut un drame, toute la ville était en émoi et il a fallu que les anciens calment les jeunes qui voulaient faire une émeute.
Les manifestations de solidarité et de soutien à la famille de Noël furent très nombreuses. Chacun de nous, au plus profond de nos entrailles étions touchés, meurtris, accablés. C'était la liberté qui venait d'être assassiné.

La non condamnation de son meurtrier fut pour les Bônois un autre coup porté  ... une incompréhension, une injustice ...

Voilà chère Simone, le témoignage de papa. Je crois que l'"emplacement sur la photo est celmle de la place Alexis Lambert (je n'en suis pas certaine) où Noël est tombé

Correctif à ce témoignage de Jean-Pierre Bartolini du 7 octobre 2015
 

Bonsoir Simone,
Merci pour cet hommage à mon ami, "mon frère de combat". Je mets cela entre guillemets parce qu'à l'époque des faits , on était des jeunes, on ne comprenait rien à la politique et on exécutait des "taches pour la patrie". On n'était pas dans l'OAS car officiellement tant qu'on n'avait pas 18 ans, on ne pouvait en faire partie.. C'est vrai qu'on a risqué notre peau pour pas grand-chose sinon la fierté de l'avoir fait et de braver l'ordre gaullien. Le témoignage de monsieur Miralles comporte au moins une erreur. Il dit qu'il y avait quatre colleur d'affiches, pas du tout, nous étions quatre. Deux c'était pour la presse, pour éviter que la recherche ne porte sur les autres, mais les autorités savaient qu'on était quatre.

D'autre part, je m'étonne que Noël aille coller avec des adultes. Noël était avec les jeunes de son âge dont j'en connaissais la plupart dans le quartier car il habitait derrière le magasin de ma mère. Ce n'était pas un flambeur. Il était un peu timide. Il était devenu colleur et distributeur à la suite de l'incarcération de son frère Jean-Pierre pour activisme OAS.

Je vous donne l'adresse du petit film de l'enterrement de Noël où vous pourrez voir le mur et le trottoir où il a été abattu. Ce film a été tourné en 1962 par un ami Marc Spina et dans lequel nous avons ajouté des photos car une partie du film n'était pas récupérable.

Voir ce film : ICI

Site La Seybouse : ICI   (Descendre presque en bas de la page pour lire l'article)

 obseques jean noel mei cathedrale1

 

Message de Stéphanie Cuello du 13 janvier 2016 à ma question :

- Bonsoir Stéphanie. J'ai reçu de Jean-Pierre Bartolini un rectificatif au témoignage apporté par votre père. Je l'ai inséré de façon à respecter les uns et les autres. Voulez-vous me donner votre avis et votre décision : est-ce que cela convient ? est-ce que je modifie ?
Je vous embrasse.

- Bonsoir Simone
Oui cela me convient. A l'époque des faits mon père n'était pas un adulte. Il avait 15 ans et son neveu Marius 14 ans. Vous pouvez transmettre ce message à monsieur Bartolini si vous le souhaitez.

Je vous embrasse aussi.

 

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